Gala de l’ADISQ : Marie-Mai, Éric, Vincent et… Fred, grands gagnants

Vincent Vallières et son Félix de la chanson de l’année pour On va s’aimer encore. Photo Catherine Lefebvre

Marie-Mai est toujours la reine. Eric Lapointe est devenu le roi. Et On va s’aimer encore, de Vincent Vallières, est la chanson la plus populaire. Mais au-delà de l’identité des lauréats et du total de statuettes de chacun, ce 33e Gala de l’ADISQ a mené à quelques moments d’émotion pure et à des triomphes qui méritent qu’on s’interroge quant au mode de scrutin.

Par Philippe Rezzonico

Ça faisait longtemps qu’une chanson n’avait pas fait l’unanimité comme On va s’aimer encore. Public, critiques, tout le monde est d’accord. Son thème universel a contribué à son succès, certes, mais fallait encore l’écrire de cette façon… C’est d’autant plus mérité que Vallières, aussi travaillant que perfectionniste, s’était fait blanchir il y a quelques années, après avoir été en nomination quatre ou cinq fois.

Comme l’an dernier, la tornade Marie-Mai a déferlé, la jeune femme étant une fois encore l’interprète féminine favorite du public, triomphe auquel elle a ajouté le Félix pour le Spectacle de l’année – Auteur-compositeur-interprète. Eric Lapointe avait remporté le Félix de l’Album rock, lundi dernier, à L’Autre Gala, rampe de lancement pour son titre d’Interprète masculin de l’année dimanche, une première après 12 Félix au cours de sa carrière.

Marie Mai a remporté les Félix de l’interprète féminine de l’année et du Spectacle de l’année – Interprète. Photo Catherine Lefebvre

Révélation qui va à Brigitte Boisjoli, Artiste québécois s’étant le plus illustré hors Québec remis à Arcade Fire – dont trois membres étaient sur place -, l’Album de l’année – Folk Contemporain décerné aux douze rapaillés… Rien d’étonnant de ce côté.

La popularité l’emporte

En revanche, pour la deuxième année consécutive, le groupe de l’année fut le band le moins présent sous les feux des projecteurs. Les Cowboys fringants, couronnés, sont en break syndical depuis la fin de leur tournée…en 2010. Du moins, au Québec. Ces derniers avaient laissé un message sur le web – sérieux ou pas ? – incitant leurs fidèles supporteurs à ne pas voter pour eux, mais leur popularité dépasse de loin celle de leurs fans purs et durs, anyway.

Jérôme Dupras, Marie-Annick Lépine et Karl Tremblay, des Cowboys fringants, groupe préféré du public. Photo Catherine Lefebvre

L’an dernier, ce fut la même histoire avec Mes Aieux, plutôt discrets eux aussi, qui avaient remporté ce trophée. C’est ce qui arrive quand une catégorie dont le vote reposait naguère sur les membres de l’Académie (environ 700 personnes) en devient une tributaire à 100 pour cent d’un vote populaire.

Les jurés votent selon une grille d’analyse et les membres de l’Académie baignent dans l’industrie de la musique. Le public, lui, vote pour ses favoris. Personne n’est fautif. Surtout pas les Cowboys qui n’ont pas démérité et qui ont salué Toaster et Dean, deux de leurs fans qui ont vu 100 de leurs spectacles. N’empêche, deux évidences : Karkwa vient de se faire voler deux années de suite et le mode de scrutin dans cette catégorie pourrait peut-être reposer sur deux pôles: vote public et vote de l’Académie.

Rivaliser à armes égales ?

Le Félix remis à l’Auteur ou le compositeur de l’année a, quant à lui, été partagé avec une légende disparue – Gaston Miron – et Gilles Bélanger, formidable auteur et compositeur qui mérite amplement une reconnaissance pour son travail colossal dans le projet de disque et de scène Douze hommes rapaillés.

La majorité des Douze hommes rapaillés sont venus quérir leur prix. Photo Catherine Lefebvre

Mais comme je le notais plus tôt cette semaine, c’est un non sens et une injustice que des chansons, textes ou œuvres composées à d’autres époques (comme Les Belles-sœurs de Michel Tremblay, La mélodie du bonheur) soient en lice face à des créations contemporaines. On ne peut rivaliser à armes égales contre Miron, Tremblay, Vigneault, Ferland ou Félix…

Des performances réussies

Au plan performances, le gala aura offert une large vitrine à plein d’artistes qui n’ont pas raté leur coup : Martin Léon avec Karkwa, Radio Radio et Samian avec Marie-Mai, tous les candidats en lice à la Révélation les uns après les autres : c’était aussi dynamique que l’animation de Louis-José Houde, qui a été spectaculaire. Mais c’est probablement le discours du grand Gilles Vigneault qui aura été le plus touchant, avec, bien sûr, le salut de Ginette à son ami musicien décédé récemment.

Fred Pellerin termine sa semaine de l’ADISQ avec trois Félix et un hommage émouvant à Gilles Vigneault. Photo Catherine Lefebvre

Au final, je me dis que Fred Pellerin, mine de rien, est peut-être le type le plus heureux qui soit. Avec son triomphe pour le Spectacle de l’année – interprète, il porte à trois son nombre de Félix cette année, après avoir gagné ceux de la mise en scène et de scripteur pour St-Elie-de-chansons.

Comme quoi ce ne sont pas toujours les plus visibles qui partent chaque année avec le plus grand nombre de statuettes. Au moins, il y a une justice.