Le train filant à toute allure des Doobie Brothers

John McFee, arrivé en 1979, et les membres fondateurs Tom Johnston et Patrick Simmons. Photo Andrew Macpherson

John McFee, arrivé en 1979, et les membres fondateurs Tom Johnston et Patrick Simmons. Photo courtoisie Andrew Macpherson

Salle Wilfrid-Pelletier, le 5 juillet 2010. Le Steve Miller Band et The Doobie Brothers se partagent l’affiche au Festival international de jazz de Montréal. Le groupe de la Côte ouest américaine est le premier à se produire sur scène. Je me disais que j’aurais inversé les rôles. Simple question de rythme et de répertoire.

Par Philippe Rezzonico

J’avais vu juste. Tom Johnston, Patrick Simmons, John McFee et leurs collègues ont largué d’entrée de jeu leurs bombes fédératrices. Surpris par cette attaque musicale digne d’un train qui file à toute allure, la foule est restée abasourdie durant quelques chansons avant de se lever et de transformer la grande Wilfrid en salle intimiste où tout le monde a fait la fête.

En dépit de tout son talent, ce soir-là, Steve Miller s’est quelque peu fait voler le show. D’autant plus qu’il a invité Simmons – qui était déchaîné – à venir jouer trois chansons avec lui durant son set.

Six ans plus tard – et après un passage apprécié au Festival d’été de Québec à l’été 2015 -, The Doobie Brothers remettent ça, cette fois, au Centre Bell. Trois spectacles pour les Américains au Québec en six ans… Un peu étonnant venant de la part d’un groupe que l’on n’avait pas vu depuis 1996 quand ils se sont présentés au FIJM en 2010.

« Nous n’avons certainement pas joué à Montréal aussi souvent que nous l’avons désiré, assure Tom Johnston, chanteur, guitariste et membre fondateur du groupe en 1970. Mais de nos jours, nous offrons un spectacle plus soudé que jamais. Dans le temps, on déployait surtout nos qualités d’instrumentistes. »

En activité depuis plus de 45 ans – hormis une rupture de cinq ans durant les années 1980 -, The Doobie Brothers a eu droit à 25 (!) formations différentes depuis ses débuts. Plus que The Temptations… Ce n’est pas rien.

Et dépit des allées et venues des membres, le groupe a su maintenir l’intérêt auprès de ses fans, que ce soit avec Johnston, Simmons ou Michael McDonald en qualité de chanteur principal.

« Nous avons de très fidèles amateurs, pas de doute là-dessus, confirme Johnston. Et quand on voit que nos chansons sont encore jouées à la radio, ça prouve qu’elles importent encore aux gens. Et pas seulement à ceux de notre génération. On voit depuis quelques années beaucoup de jeunes à nos spectacles qui nous voient sur scène pour une première fois.

« Nous n’avons pas la foule intergénérationnelle d’un groupe universel comme les Rolling Stones, mais des jeunes ont découvert nos chansons par le biais de l’écoute musicale en continu avec les Spotifiy, Apple et compagnie.  Ça, je dois admettre que c’est très gratifiant. »

Retour en studio?

Le groupe a mis en marché neuf albums en un peu plus de dix ans à ses débuts. Une production énorme qui s’est raréfiée par la suite. On sent néanmoins un regain d’intérêt avec un trio d’albums depuis le début du 21e siècle.

« On aimerait bien mettre en marché un nouvel album de compositions originales en 2017, assure Johnston. Nous en avons d’ailleurs quelques-unes de composées. Mais on ne le fera pas sans contrat de disque et ça fait un petit moment que nous n’avons pas de maison de disques. Ça prend un vrai label pour faire un disque.

« Cela dit, les gens n’achètent plus de disques, sauf ceux d’artistes comme Taylor Swift ou Adele. En 2010, on a fait l’album World Gone Crazy, notre dernier album de matériel original et, selon moi, probablement notre meilleur disque depuis Stampede (1974). Mais il est un peu passé sous le radar. »

En 2014, The Dobbie Brothers ont lancé un album de reprises, Southbound, qui était aussi un album de duos avec des artistes de la scène country. Des classiques comme Listen to the Music, Black Water, Long Train Runnin’, Rockin’ Down the Highway ont eu droit au concours des Brad Paisley, Huey Lewis, Zac Brown Band et consorts.

« Nous étions avec tous ces artistes de calibre «A» de Nashville et chacun d’entre eux est venu nous dire à quel point il écoutait notre musique depuis des années. Ils avaient tous une chanson favorite, etc. Sincèrement, je n’avais pas idée que nous avions eu tant d’influence auprès de tant de gens.

« La musique des Doobie Brothers, c’est un dérivé du rock n’ roll, du r&b et du blues avec trois voix en avant-plan. Ça a toujours été ça, sauf durant la période de Michael (McDonald, tournant des années 1970-1980). »

Patrick Simmons, Tom Johnston et John McFee en spectacle. Photo courtoisie Dave Mason

Patrick Simmons, Tom Johnston et John McFee en spectacle. Photo courtoisie Dave Mason

Les amateurs qui ont l’œil exercé remarqueront la présence de Bill Payne avec The Doobie Brothers au Centre Bell, samedi soir. Payne, c’est le pianiste/claviériste fondateur de Little Feat, qui a été une partie importante du son des Doobie Brothers, même s’il n’est un membre officiel de tournée que depuis 2012. Ce dernier était déjà présent au nombre des musiciens invités sur des albums aussi anciens que Toulouse Street (1972) et The Captain and Me (1973).

«Bill est un vieil ami qui a joué sur presque tous nos disques, précise Johnston. Il est un musicien incomparable aux claviers, il connaît notre répertoire à fond et il peut jouer n’importe quoi. Ça tombe bien. Outre les chansons que tout le monde veut entendre, on fait durant cette tournée des chansons du répertoire (Dark Eyed Cajun Woman, Eyes of Silver, Clear as the Driven Snow) que l’on n’interprète pas si souvent. Des deep cuts, comme on dit. »

The Dobbie Brothers, le samedi 8 octobre au Centre Bell.