
Dolores O'Riordan - photographiée lors de son passage à L'Olympia en 2009 - et ses collègues étaient de retour au Métropolis, mardi. Photo d'archives. Courtoisie Annik MH de Carufel.
Pour leur premier spectacle à Montréal depuis la parution de leur premier disque de matériel original en plus de dix ans, les Cranberries ont été moins fiévreux sur scène que lors de leur retour de 2009 à L’Olympia, mais leurs succès des années 1990 auront mené à une prestation rassembleuse auprès d’un public qui voulait revivre sa jeunesse.
Par Philippe Rezzonico
Non, ce n’était pas aussi déjanté et débile qu’à L’Olympia de Montréal à l’automne 2009. Et c’était prévisible… Cette année-là, la bande à Dolores O’Riordan venait de reprendre du service après des années de pause commune et tout le groupe était d’une spontanéité digne de leurs débuts. C’était les grandes retrouvailles, il n’y avait pas d’album à promouvoir, et tout le monde était là – au parterre et sur scène – uniquement pour le pur plaisir de la chose.
Le retour au Métropolis, mardi, s’inscrivait plutôt dans la logique traditionnelle de l’industrie. Parution d’un disque (Roses) mis en marché il y a trois mois et tournée obligatoire. Disque qui a eu peu de voix au chapitre d’ailleurs, avec uniquement une poignée de titres interprétés.
Remarquez, à l’écoute de Tomorrow, Schizophrenic Toughts, Conduct et Losing My Mind, je me dis que le band a pris la bonne décision de miser sur ses classiques. Aucune des chansons que je viens de nommer ne va passer à l’histoire. Même pas celle du groupe…
Plaisir commun
Par contre, le plaisir était réel et partagé quand les Cranberries puisaient dans leur catalogue. Et ils ne s’en sont pas privés. Hormis Tomorrow, la première demi-heure a été une cascade de vieilles chansons et de gros succès : Dreams et Linger, dont la foule a repris les refrains au vol, Animal Instinct et Just My Imagination, saluées par des clameurs dès les premiers accords, et Ode to my Family, toujours irrésistible avec ses « tu-tu-tu » repris en chœur. Fun noir, pour ce public fin trentaine et jeune quarantaine.
Cela a permis à la jeune quadragénaire qu’est Dolores de démontrer toute sa fougue en balançant ses bras dans les airs comme si elle était un pantin vaguement désarticulé et d’y aller de ses curieux déplacements latéraux et saccadés, comme si elle twistait uniquement avec ses pieds. Bref, tout croche, comme d’habitude, mais sympathique.
Sympathique, elle le fut complètement, prenant un malin plaisir à s’adresser à la foule avec son français aussi approximatif que charmant. Les spectateurs lui ont rendu cette chaleur, un fan installé au devant de la scène lui offrant un scrapbook de photos des Cranberries à travers les ans. Ce n’était pas loin d’être touchant, ça.
Voix au poste
O’Riordan possède toujours cette voix à la fois aérienne et aiguë qui charme ses admirateurs et agace ses détracteurs. Elle a néanmoins très souvent fait appel aux spectateurs, comme si elle estimait que les chansons des Cranberries appartenaient désormais autant aux fans qu’au groupe.
Particulièrement vrai pour Dreams, When Your Gone – quand elle s’est assise à l’avant-scène -, Ridiculous Thoughts, et bien sûr, Zombie, qui a balayé la salle avant le rappel. Cette chanson a une puissance qui ne s’est jamais démentie au cours des ans. Grand moment.
Là où les Cranberries ont raté leur coup, c’est au plan de la production. Un peu inadmissible d’avoir un drap comme fond de scène quand on a une carrière internationale. Il y a trois ans, lors d’une tournée spontanée de retrouvailles, on n’avait pas relevé la chose. Mais là…
Reste maintenant à savoir si c’est le retour d’un disque ou celui d’une décennie entière. On l’ignore, mais à en juger par la réaction des fans au terme de Salvation qui a conclût la soirée comme un coup de canon, on se dit qu’il y a probablement un autre tour de piste en vue.