On le connaît comme étant le guitariste qui joue plus vite que son ombre, lui qui fut le franc-tireur des Breastfeeders de 1999 jusqu’à récemment. Sunny Duval est pourtant bien plus qu’un redoutable joueur de six cordes électrique. En fait, il est plus qu’un guitariste et il nous convie à découvrir cette autre facette de lui, vendredi, au Lion d’Or, durant le Coup de cœur francophone.
Philippe Rezzonico
Au menu, de la chanson francophone qui repose sur du rock, certes, mais encore plus sur du R & B, de la Soul, des rythmes cajun et des épices zydeco. En bref, des compositions qui trempent dans la divine marmite des influences qui ont façonné La Nouvelle-Orléans d’hier et d’aujourd’hui. C’est le temps de redécouvrir Sunny Duval. C’est le temps de découvrir le Soul n’ Roll Man.
Attablé dans un café du Plateau, la conversation avec Duval prend des allures de rappel de virées aux États-Unis. Ça tombe sous le sens. Une partie de l’inspiration de son disque Amour d’amour tient en bonne partie à des périples effectués en Louisiane (La Nouvelle-Orléans, Lafayette) et au Tennessee (Memphis), lieux mythiques de la musique de racines américaines squattés à maintes reprises par le journaliste.
« Le disque, c’est un peu la résultante de deux road trips à Memphis, à Nashville et en Louisiane. Depuis 5 ans, j’écoute aussi beaucoup de Soul et de R & B. Depuis que je suis DJ, en fait. Ce sont les musiques que je trouve les plus intéressantes. Et dans ces cas-là, je vais aux sources. Et la source, c’est La Nouvelle-Orléans avec sa culture riche. La Soul des années 1940 et des années 1950, la musique cajun, zydeco, etc.
« J’ai été neuf fois là-bas. Chaque fois, je ramenais un disque et il y avait aussi le temps passé sur place. Toutes les musiques que je préfère sont sorties de là. »
Explosion sonore
L’écoute de Amour d’amour est fort révélatrice. Si la chanson-titre est un vivifiant croisement entre rockabilly, effluves country et même pop yé-yé, le reste du disque affiche ses couleurs musicales : chaudes, rondes et fédératrices, gracieuseté de cuivres pétaradants, de zestes d’harmonica et de chœurs rassembleurs qui évoquent le gospel.
L’autre partie de l’inspiration, il faut la chercher dans le titre et dans les textes des deux tiers des chansons : Fleur d’oranger, J’aime quand tu m’appelles mon amour, J’ai hâte à ce soir, Loin de toi, Ta face, Fou de toi (pas une reprise de la chanson de Pag) et Belle comme la braise. L’amour. L’amour toujours. L’amour désir. L’amour déchirant. L’amour mur à mur, finalement.
Ça, c’est une image différente de celle que l’on se faisait de Sunny Duval, le guitariste à la carrure solide et à la mâchoire close. Surtout que sur scène, on l’a parfois vu montrer des dents. J’ai le souvenir d’un spectacle des Breastfeeders où Sunny a fait valser Johnny de la scène au parterre avec une poussée irrésistible. Et l’atterrissage ne s’est pas fait en douceur…
Le ministre de l’amour
« (Sourire) Il avait toujours l’habitude de marcher sur mes pédales… Oui, quand j’ai composé, j’abordais une relation amoureuse. Quant à moi, il n’y a pas beaucoup de politiciens qui abordent ce sujet-là. Il devrait pourtant y avoir un ministère de l’Amour.
« Je trouve que nous sommes dans un monde qui peut être très, très, très gris. Qui peut être déprimant. Je n’ai pas l’intention de participer à ça. Moi, c’est ma réponse, de proposer des chansons ensoleillées, des riffs qui se dansent et parler d’amour.
« Moi et Damien Robitaille, je trouve qu’on a ça en commun. Pour moi, je suis un crooner. C’est sûr que c’est une facette de ta personnalité qui ne paraît pas beaucoup quand tu as été le guitariste des Breastfeeders durant dix ans, qui n’est pas un groupe spécialement romantique. Mais c’est un côté de moi qui a toujours été là et qui ressort sur cet album-là.
« L’amour, c’est la chose la plus importante au monde et c’est la chose qui est la plus négligée… sauf dans les chansons. Il y a un manque d’amour incroyable. La planète pourrait disparaître très bientôt, mais on a l’impression que l’argent et le pétrole sont plus importants. »
Au fait, pourquoi avoir quitté les Breastfeeders? Après tout, Duval a lancé trois disques de son cru ou avec d’autres collaborateurs (Approche la ruche, Achigan, Sein noir sein blanc) alors qu’il était membre du groupe rock?
« Too many cooks, comme on dit. Trop de chefs et trop d’indiens dans le même groupe, alors que je pouvais faire ma propre cuisine avec tout ce que je veux dedans. C’était un non-sens de poursuivre une relation qui était périmée, selon moi. »
Pour le spectacle de vendredi, Sunny et ses SweetCoeurs (Victoria Lord, Mark Hébert, Patrick Nadon, Mara Tremblay) risquent d’ensoleiller – comme il le dit – notre automne frisquet. Outre son groupe de base, nous aurons droit à un trio de cuivres (saxophone, trompette, trombone) qui vont pouvoir reproduire l’effervescence du disque.
« On va s’en donner à cœur joie. »
Message reçu.
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Sunny Duval et les SweetCœurs, le vendredi 8 novembre (20 heures), au Lion D’Or, lors du Coup de cœur francophone. Première partie : Dalton Télégramme.