Il y avait muchas personas, mercredi soir, au Centro Bell. Non, il n’y a pas de fautes de frappe. En fait, j’avais l’impression que tous les latins de Montréal étaient présents au concert de Shakira.
Par Philippe Rezzonico
Peut-être pas tous, mais on entendait causer espagnol bien plus qu’en anglais ou en français pour le retour de la Colombienne après huit ans d’absence. Une artiste que l’on a bien failli ne plus revoir, d’ailleurs.
Il y a eu, bien sûr, la naissance de ses enfants avec le joueur de football Gérard Piqué, du Barça, mais aussi l’hémorragie à ses cordes vocales qui a mené au report de la tournée El Dorado qui devait passer en ville l’an dernier.
« Il y a quelques mois, j’ai pensé que je ne chanterais plus jamais, a-t-elle dit à la foule en français. Mais les miracles existent. C’est grâce à vous que je suis ici. Merci. »
Dans les faits, Shakira s’est exprimée exclusivement en français aux 13 500 spectateurs. Surtout aux spectatrices, en fait. Au point que ma voisine, une latino qui parle parfaitement le français, a hurlé : « En espagnol! ». C’était quelque peu surréaliste, il faut admettre.
Ce qui était aussi surréaliste, aussi, c’est de savoir que Shakira a 41 ans. Elle est arrivée sur scène en courant comme une adolescente. Même durant les immenses gros plans de son visage retransmis sur les gigantesques écrans circulaires ou rectangulaires, on lui donne 29 ou 31 ans, au maximum.
Belle, racée, sexy, sensuelle, aguichante et provocante : les mouvements de hanches, de bassin et de sa poitrine sont parfois plus que suggestifs. Durant Perro Fiel, la chanteuse s’est pris les seins à pleines mains une demi-douzaine de fois. J’ai vérifié avec la traduction, ça concorde parfaitement avec le propos du texte. On ne parle pas d’allaitement maternel…
Comme les Américaines
Certains aspects du concert de Shakira ressemblent beaucoup à ceux de vedettes américaines comme Madonna, Lady Gaga, P!nk ou Katy Perry. Mais avec parfois des variantes.
Du côté des similitudes, on retrouve l’utilisation d’éléments pyrotechniques, de lance-flammes et de confettis. On a même eu droit à une pluie de confettis lors du doublé Estoy aqui, Donde estas corazon ? en ouverture. D’ordinaire, on attend à la dernière chanson de la soirée. Shakira nous offre aussi un intermède mollo en milieu de parcours avec un bivouac acoustique. Splendide Antologia.
En revanche, il n’y a aucun danseur ou danseuse avec elle. Et ça se comprend. Après avoir vu son numéro de baladi durant Whenever, Whenever, tu comprends que quiconque serait à ses côtés se ferait ridiculiser. Quand on voit Madonna ou Beyoncé se déchaîner sur scène, on sait que c’est au prix d’un entraînement féroce. Shakira? C’est tout naturel.
Elle démontre à quel point elle est une femme forte en brisant ses chaînes en ouverture de She Wolf, qu’elle interprète avec le concours de la foule qui hurle au loup avec elle.
Et toutes les bombes d’allégeance anglosaxonne, colombiennes et africaines sont au rendez-vous : Si te vas, Underneath Your Clothes, Me enamoré, Inevitable, Amarillo, La La La, La Tortura, Waka Waka (This Time For Africa) et Hips Don’t Lie. Pop, salsa, cumbia, reggaeton, c’est un feu roulant ininterrompu durant près de deux heures.
Chantaje devient même une chanson à répondre avec la foule. Et comme elle se trouve dans une ville francophone, Shakira offre au rappel Je l’aime à mourir, classique de Francis Cabrel qu’elle a enregistrée en 2011, sur une petite scène au milieu de la foule.
Lorsqu’elle a bouclé la soirée sur La bicicleta en sautant comme une possédée, pieds nus, sur scène, j’ai l’impression on a entendu plus de « gracias » que de « mercis » dans la foule. Comme il se doit.