FIJM 2014 : Boogie Montréal

Verdine White, Philip Bailey et Ralphn Johnson de Earth Wind & Fire. Photo courtoisie FIJM/Denis Alix.

En tenant compte du facteur humidex, le mercure a allègrement franchi la barre des 30 degrés Centigrades, lundi soir. Une journée d’été caniculaire comme on les aime. Mais par moments, il faisait encore plus chaud à la salle Wilfrid-Pelletier en soirée où se produisait le groupe Earth Wind & Fire.

Par Philippe Rezzonico

Le collectif qui a plus de quatre décennies d’activités derrière lui n’était pas passé depuis des lustres à Montréal. Si le temps a filé et que la composition de ce band à géométrie variable a changé depuis ses débuts, le noyau dur du groupe est encore capable d’incendier et de faire trembler une salle. La terre et le feu, quoi.

D’ailleurs, quand tu amorces un spectacle avec un méga-tube du calibre de Boogie Wonderland, cela indique que tu as des tas de munitions pour la suite. Dès que les musiciens ont pris place sur la scène pour amorcer la bombe musicale née en 1979, la salle comble s’est levée d’un bloc.

Certes, le fondateur Maurice White n’est plus de la partie depuis une vingtaine d’années à la suite d’un diagnostic de la maladie de Parkinson, mais trois des six membres originaux tiennent encore solidement le fort : le chanteur Philip Bailey, le chanteur-batteur-percussionniste Ralph Johnson et l’exubérant bassiste Verdine White, le frangin de Maurice, qui affiche encore une fougue du tonnerre à 62 ans.

Et avec eux, neuf autres musiciens, dont l’acrobatique chanteur-percussionniste B. David Whitworth qui peut jouer de ses cymbales en les frappant d’un coup de pied et la section de cuivres formée de Bobby Burns (trompette), Reggie Young (trombone) et Gary Bias (saxophone), les deux derniers étant aussi massifs que les portiers du Métropolis. Quand ces trois-là s’avancent au-devant de la scène, ça déménage.

Déferlante

Et déménager, c’était le mot d’ordre durant la première demi-heure. Une Boogie Wonderland étirée à souhait, donc, suivie de Sing A Song, My Promise, Shining Star et Serpentine Fire. Je vous les défile comme ça, parce que c’est l’effet qu’elles ont fait : une cascade de chansons pop, R&B, soul et funk qui ont maintenu le rythme trépidant.

Une Sing a Song interprétée à quatre voix (quelles harmonies, ce band! Les Beach Boys de race noire) et bien chorégraphiée, une Shining Star dont la ligne de basse de White résonne encore dans ma poitrine et du visuel des années 1970 en arrière-plan de Serpentine Fire. Une déferlante.

Instrumentistes de calibre

Si EWF a un répertoire de tubes dans fond, les membres sont aussi de sacrés musiciens : long solo de saxophone brûlant de Bias sur Sun Goddess, percussions à n’en plus finir durant Evil – Breakdown et, bien sûr, un nombre considérable de chansons entendues sur les ondes FM depuis des années.

En point de presse, Bailey, White et Johnson notaient qu’une chanson de EWF était jouée quelque part sur Terre à chaque minute et 36 secondes… Précis, en plus.

Ça explique le segment qui comprenait Devotion, That’s The Way – quand le trio prend place sur des tabourets -, After The Love is Gone (grand frisson dans la foule) et Reasons, durant laquelle Bailey a montré qu’il pouvait encore porter sa voix dans la stratosphère, même s’il en a mis un peu trop à mon goût.

Chacun à sa préférence. Moi, ce sont les bombes d’EWF. Après une Got To Get Into My Life (moche) qui a servi aux membres du band afin de serrer les mains des spectateurs massés devant la scène, on a repris les choses sérieures.

Fantasy, September et Let’s Groove, en succession, c’est comme si une division de blindés s’apprêtait à vous foncer dessus, surtout quand White s’installe au centre avec les guitaristes derrière lui : refrains fédérateurs à l’unisson, chorégraphies collectives aussi rodées que ce groupe soudé à l’extrême et un irrépressible plaisir communicatif.

Quand White, Bailey et Johnson se sont réunis au centre de la scène pour accepter les applaudissements avant le rappel prévu de In the Stone, je me disais que les rares jeunes (20 et 30 ans) présents dans la salle pouvaient applaudir autant que les spectateurs plus âgés.

Comme Kool & the Gang, les Temptations et autres Syl & the Family Stone, Earth Wind & Fire a mis au monde des tas de chansons dont les échantillonnages ont servi aux jeunes rappeurs dans les années 1990 et 2000.

Lundi, c’était bien évidemment un spectacle nostalgique à souhait, mais en livrant les chansons avec la même ferveur qu’à leurs jeunes années – quoiqu’avec des costumes moins excentriques – EWF a démontré que la retraite, ce n’est pas encore pour tout de suite.