Garbage : un phénomène nommé Shirley Manson

Shirley Manson, de Garbage, l’été dernier au festival Osheaga. Photo courtoisie evenko/Pat Beaudry

Nous allons voir des spectacles pour nous divertir, pour faire des découvertes et pour (ré) entendre des chansons qui ont une signification pour nous. Parfois, pour toutes ces raisons. Mais il est des shows où nous nous déplaçons pour voir et entendre quelqu’un en particulier. Dans le cas de Garbage, la raison a toujours pour nom Shirley Manson.

Par Philippe Rezzonico

Depuis l’électrochoc vécu au Spectrum en 1996, chaque retour sur scène de Garbage à Montréal permet de mesurer à quel point l’Écossaise fait partie de cette courte liste de bêtes de scène féminines.

Je me dis que je suis partial. Comment un homme peut-il résister à l’allure séduisante et sexy de la rouquine qui possède encore, à 46 ans, sa taille de jeune fille et toute sa puissance vocale? Mais quand je croise durant le spectacle ma copine Indiana qui salive autant que moi sur la chanteuse, je me suis que Manson fait l’unanimité auprès des sexes.

Non pas que les guitaristes Steve Marker et Duke Erickson, que le producteur de légende et batteur émérite Butch Vig, ainsi que l’ex-bassiste de Jane’s Addiction Eric Avery, ne font pas le travail. Bien au contraire. En fait, depuis le «retour» de Garbage après quelques années d’éclipse, on réalise que ce groupe joue avec autant de fougue qu’à ses débuts, mais avec un plaisir bien plus évident.

Mais il est impossible – ou presque – de détacher notre regard de Manson qui chante, harangue, séduit, crie et tournoie sur les planches. Ferveur dans le geste, passion dans le regard et contact permanent avec les spectateurs au parterre appuyés sur la scène qui buvaient ses paroles.

La complicité

Bavarde comme jamais, Manson a créé une complicité exceptionnelle avec la foule. On sentait l’émotion dans sa voix, particulièrement après un tonnerre d’applaudissements qui a suivi une livraison dynamitée de Push It.

Elle a surtout mis les choses en perspective au sein de son industrie mouvante avant l’interprétation d’une vivifiante Cherry Lips (Go Baby Go).

« On nous disait que ce n’était pas une bonne chanson. On l’a quand même mis sur le disque (Beautiful Garbage, 2001) même si la compagnie ne voulait pas. Chaque soir qu’on la joue, tout le monde chante les paroles.  Pourtant, un douchebag qui n’a jamais composée une chanson dans sa vie pensait le contraire. »

Ah! Shirley… Engagée durant Supervixen, habitée lors de I Think I’m Paranoïd, accroupie et à genoux lors de l’explosive Why Do You Love Me et transcendante comme pas une durant Queer, assurément l’une des meilleures livraisons de la soirée.

Les nuances

Fragile, aussi, quand elle interprète Milk – la première chanson jamais composée par Garbage – et #1 Crush, toujours déchirante avec sa phrase «I will die for you ». Mais Shirley est prête à faire la fête sans retenue quand elle fait vibrer le Métropolis avec Vow et Only Happy When It Rains, amorcée en version lente, comme c’est le cas depuis quelques années.

Et elle sait faire des clins d’œil au passé, la Shirley. La version vitaminée et ultra mélodique de Special s’est terminée sur un court extrait a capella de I Go To Sleep, des Pretenders, tandis que Stupid Girl (boum!) été envoyée en orbite sur la charpente de I Feel Love, de Donna Summer.

Le spectacle de Garbage ne révolutionnera certes pas le genre, mais quand You Look So Fine a conclu la soirée après 110 minutes de performance, tout le monde est sorti du Métropolis pleinement heureux.

Ça tombait bien, une pluie fine tombait alors sur la ville…