Joss Stone: la Lady Soul 2012

Joss Stone: la voix, le look, l'âme et la dégaine. Tout y est. Photo Alain Décarie.

Les Anglophones nomment ça un « howl ». Un genre de cri à la lune, presque primal. Celui que Joss Stone a balancé aux spectateurs du Métropolis avant son rappel mercredi soir a démontré que la jeune anglaise était dans une classe vocale où il y a peu d’élues.

Par Philippe Rezzonico

Je dis jeune, car à 25 ans, on est obligatoirement jeune. Mais dans le cas de l’anglaise, c’est trompeur, car on l’a découvert sur les planches et sur disque il y a une décennie, alors qu’elle n’était âgée que de 16 ans, pour The Soul Sessions. La belle Joss a donc bouclé une boucle en présentant les titres du disque The Soul Sessions Vol. 2, paru plus tôt cette année. Soul un jour, soul toujours…

Depuis le choc de la découverte au Cabaret Juste pour Rire en 2003, tout en passant par les spectacles vus au Spectrum et au Métropolis au cours des ans, force est d’admettre que Stone mise plus sur le passé que sur le présent.

Le gros du programme de mercredi reposait sur ses nouveaux enregistrements qui sont des reprises de classiques de la soul du passé. Qui plus est, pas nécessairement de classiques très connus. C’est la grande force de la chanteuse : être capable de reprendre à son compte des titres des Chi-lites, de Honey Come, de Womack & Womack et des Dells – moins populaires que ceux de James Brown ou Sam Cooke, disons – et de les mettre à sa main, comme s’ils avaient été écrits pour elle.

Qu'est ce que vous dites? Photo Alain Décarie.

C’était patent avec son trio d’ouverture. Flanquée de ses choristes, d’un trio de cuivres et de son groupe qui a assimilé toute l’œuvre des écuries Motwon, Stax, Atlantic et Hi! Records, Stone survole (For God Sake) Give More Power to the People, While You’re Looking For Sugar et Super Duper Love (Are You Diggin On Me?) Pt. 1 avec une aisance vocale que ne renierait pas Aretha Franklin ou Janis Joplin.

Nouvelle assurance

Surpuissante quand elle le désire, Stone sait doser selon les besoins des titres, haranguer la foule s’il le faut et se faire toute douce si nécessaire, tout en dirigeant ses musiciens comme Kent Nagano. Nous sommes loin de l’adolescente timide qui était tel-le-ment gênée sur les planches il y a dix ans.

Elle a néanmoins tendance à prendre un peu trop pour acquis que la foule connaît son catalogue de chansons comme si nous étions tous des férus de soul. Bref, quand on tend le micro à la foule, il faut être assuré de la réaction de cette dernière. Ce ne fut pas le cas à tous les coups, mais la Joss Stone de 2012 ne lâche pas prise et maintient l’intérêt auprès de ses fans.

Toute l'âme de la soul dans une voix unique. Photo Alain Décarie.

Vêtue de sa robe léopard, pieds nus – comme toujours -, la jeune femme a offert une version exceptionnelle de Teardrops, de Womack & Womack, et elle a eu la bonne idée d’inviter Ty Taylor, le chanteur de Vintage Trouble qui assurait la première partie, pour un duo atomique de Knock On Wood, d’Eddie Floyd. Même Floyd n’en avait pas fait une version si sulfureuse et dynamitée quand il l’avait interprété en plein Centre-ville de Montréal durant les années 1990. Le Métropolis a tremblé sur ses bases.

Stone a aussi renoué avec la façon de faire d’un Otis Redding en enchaînant dans divers pot-pourris des reprises de vieux classiques (I Got the Feeling, James Brown), de jeunes classiques (Fell In Love with a Boy, White Stripes) et ses propres succès (Put Your Hands On Me).

Rayon coups de cœur, l’incontournable Tell Me What We’re Gonna Do et I Don’t Wanna Be your Landlord Anymore, offerte en mode guitare-voix au rappel, valaient le prix d’entrée à elles seules. Cette dernière, composée par Stone et Dave Stewart, c’est le croisement entre la soul et le blues, là où Joss Stone dominera autant qu’elle le voudra. Et à 25 ans, ce n’est pas le temps qui lui manquera pour le faire.