Win Butler, Richard Parry et leurs compères du groupe Arcade Fire ont livré un spectacle dynamité sur la Place des festivals. Photo d’archives courtoisie Catherine Lefebvre

Histoire de faire la transition d’un spectacle dénudé de production offert à 2400 personnes au Métropolis mercredi soir, Arcade Fire avait décidé de faire son cinéma, jeudi, face à une marée grouillante de quelque 75, 000 personnes sur une Place des festivals nettement trop petite pour l’occasion.

Par Philippe Rezzonico

C’était inscrit sur l’écran géant central qui surplombait la scène du côté Nord de la rue Jeanne-Mance : « Coming Soon, Arcade Fire », sur une reproduction de marquise digne d’un vieux cinoche ou du défunt Spectrum. Sentiment renforcé par l’autre écran géant qui faisait face à l’esplanade de la Place des Arts, où un bon tiers de la foule monstre avait pris place pour apprécier la performance.

D’ailleurs, c’est une vidéo mimant une bande-annonce avec des extraits de clips d’Arcade Fire et le logo de la Paramount qui a pavé la voie à la venue sur scène du collectif montréalais, aussi enthousiasme et énergique que la veille.

Kif-kif

Au plan musical, Arcade Fire a essentiellement livré le même spectacle que mercredi. Hormis la présence de Wake Up en plein milieu de la prestation plutôt qu’au rappel, une rotation de chanson et un ajout, la séquence était presque identique, ce qui était prévisible en cette fin de tournée mondiale. Quand la machine est huilée à ce point, elle est d’une efficacité redoutable et mieux vaut ne rien modifier.

Les deux écrans latéraux et les trois panneaux surplombant la scène, jumelés à une structure dont le jeu de lumières pouvait être percutant, a toutefois conféré un impact supplémentaire à la performance. Déjà dynamiques la veille, les livraisons de No Cars Go, Month of May ainsi que Rebellion (Lies) n’étaient rien de moins dynamitées sous la pulsion des stroboscopes et des autres gadgets lumineux. Will Butler a d’ailleurs ajouté à la puissance de frappe en démolissant son tambour au terme de cette dernière chanson.

D’aucune façon le gigantisme de l’expérience n’a amenuisé les mélodies imparables de Haiti, Modern Man et The Suburds, chanson-titre de l’album qui aura immortalisé Arcade Fire.

Sono déficiente

En revanche, si on ne pensait pas une seconde revivre la qualité sonore observée dans le Métropolis 24 heures plus tôt, force est d’admettre que la sono a été un tantinet bancale. Son d’ensemble nettement plus axé sur les bases, guitares moins bien définies et réverbérations constantes dans l’univers de béton qui entoure la Place des festivals. Nous étions même très en dessous de la qualité mesurée en extérieur, à Osheaga, l’an dernier. Karkwa, qui a livré une prestation impeccable avant Arcade Fire, s’en est nettement mieux tiré sur ce plan.

Bien pis, il y avait un net décalage de près de deux secondes entre les images et le son, comme si les relais placés à mi-chemin du parterre étaient à la traîne des images. Ma copine Manon, située au fond de la Place des festivals, était exécrée par ce délai et la qualité d’ensemble de la sono. Son fils Julien, rien de moins que placé à la toute première rangée devant Win Butler et ses collègues, ne s’en est même pas rendu compte. Au-delà du potentiel conflit de génération, un fait demeure : quand tu assistes à un spectacle avec des dizaines de milliers de personnes, ta situation géographique va avoir un impact sérieux sur ton appréciation.

La jeune femme qui s’est écroulée à nos pieds à mi-chemin du show en raison d’une surconsommation de dope n’en avait cure. En revanche, le policier qui l’a extirpé de la foule n’aurait pas dû la relever avec violence, tel un vulgaire sac de pommes de terre. La jeune femme avait besoin de soins médicaux. Un peu de jugement, peut-être…

À la prochaine

Pendant ce temps, sur les planches, Arcade Fire, qui a loué Montréal à n’en plus finir, a livré la marchandise avec aplomb, bien conscient que ce spectacle offert pour les dix ans de Pop Montréal était la consécration de près d’une décennie de labeur. Belle façon, aussi, de mettre un terme du même coup à une année d’exception ainsi qu’à l’été.

Tiens, c’est peut-être ça qui manquait après les ballons blancs et l’interprétation de Sprawl II (Mountains Beyond Mountains). Un gros «  The End » sur l’écran, en attendant la suite des aventures musicales du groupe-phare de Montréal.