Le Cirque du Soleil au féminin

Grâce et souplesse avec Amaluna. Photo courtoisie Cirque du Soleil.

Déesses, amazones, valkyries, mythologie grecque, numéros d’acrobatie revisités de haut niveau technique, musique rock galopante et musclée : Amaluna, la nouvelle création du Cirque du Soleil, repose sur des bases classiques qui ont fait la renommée de la maison. Et le résultat mène à une solide production qui nous rappelle que le Cirque a déjà été jeune et novateur.

Par Philippe Rezzonico

Je ne sais trop si c’est le chapiteau… Après tous les spectacles vus dans des amphithéâtres ou à Vegas, ça faisait un réel plaisir de se replonger dans l’univers du Cirque du Soleil comme les gens de ma génération l’ont connu. Sous une tente.

Je ne sais trop si c’est le niveau – phénoménal – de puissance physique, d’agilité, de souplesse et de technique… Mais plus de la moitié des tableaux proposés en quelque deux heures met tellement l’accent sur la performance que la phrase «  «  Non, mais… comment font-ils ? » revient très, très souvent dans notre esprit.

Je ne sais trop si se sont les numéros qui réclamaient cette musique ou si c’est l’inverse, mais je n’ai aucun souvenir d’une trame sonore d’un spectacle du Cirque autre que celles liées à des artistes pop (Love, Viva Elvis, Immortal Tour) où la musique repose sur des rythmiques si endiablées et des solos de guitares mordants. Me suis cru à un show rock. Tout le temps.

Je ne sais trop si les clowns ont déjà…. Non. Ça, je sais. Encore une fois, l’aspect humour n’avait rien à voir avec la trame narrative de ce récit, les numéros loufoques servant – comme dans le cirque traditionnel – à rompre la tension du numéro précédent. Cela dit, la rigolote nounou et son Capitaine Crouche n’ont pas été les pires que l’on a vus au cours des ans. Pas mal, quand même, cette particulière séance d’accouchement.

Entre ciel et terre

De la scène circulaire, les artistes du cirque s’éclatent entre ciel et terre. Parfois, aux deux endroits en même temps.

Le numéro où des porteurs font tournoyer et culbuter avec leurs pieds des voltigeuses qui font virevolter des météores lumineux va à une telle vitesse que ça donne le tournis.

Des barres asymétriques revisitées. Photo courtoisie Cirque du Soleil.

Même constat lors d’un numéro qui est une variante des barres asymétriques – bien pensé. Les Amazones vont tellement vite qu’il est difficile de suivre toutes leurs prouesses. Tellement vite, en fait, que l’une d’entre elle a raté la barre supérieure sur une reprise et s’est retrouvée à plat ventre… 15 pieds plus bas. Ça fait mal, mais on se relève.

A mi-chemin entre le plancher des vaches et le sommet du chapiteau, la séquence passée sur de multiples fil de fer, placés en triangle, m’a coupé le souffle. Pensais jamais voir une équilibriste traverser un fil en faisant des pointes de ballet et une autre… en talons hauts ! Ça, c’est ajouter de la difficulté technique.

Facile....rester en équilibre sur un fil. Photo courtoisie Cirque du Soleil

Toujours plus haut, nous avions le trio de valkyries qui occupaient tout l’espace au-dessus de la scène et même plus, passant allègrement au-dessus des spectateurs des premières rangées. Déjà vu, mais à trois, on pense qui a fallu beaucoup d’entraînement pour ne pas se rentrer dedans. Spectaculaire. Tout comme le numéro de la tempête où le couple homme-femme s’offre des élans torrides entre ciel et terre, attaché à des courroies.

Summum de puissance, le numéro de planche sautoir avec la variante de la plateforme inclinée, ainsi que le mât chinois, où la vedette masculine de la soirée, le beau Roméo, y grimpe comme s’il échappait à la gravité.

Comment fait-il pour défier la gravité ainsi? Photo courtoisie Cirque du Soleil.

Summum de grâce, la séance de voltige aérienne au cerceau de la déesse de la Lune. Summum de grâce et de puissance, le numéro d’équilibriste de la jeune Miranda qui se passe sur la rampe du grand bol d’eau translucide dans lequel la jeune femme imite Esther Williams afin de séduire son Roméo.

C’est d’ailleurs l’un des rares moments où l’histoire d’amour – l’histoire tout court – prend le dessus sur les tableaux unitaires de performances, hormis, peut-être, le numéro de jonglerie où l’homme lézard, Cali, enferme Roméo dans le bol d’eau.

On comprend que les concepteurs doivent créer un fil conducteur, un canevas, une histoire, mais ce n’est pas pour ça qu’on ira voir Amaluna sous le chapiteau du Vieux-Port jusqu’au 15 juillet. On ira pour voir le Cirque à son meilleur dans une création dont la forme et l’esthétisme rassembleront le public de tous les âges.