Le Top 50 de Frank (37): la berceuse de Samuel

Cet album empreint d’une remarquable beauté a été le témoin de ma brève vie familiale. Il a bercé les dodos matinaux de bébé Samuel. C’est dire si je l’ai écouté et écouté encore. Malgré cela, je ne m’en suis jamais lassé.

Par François Vézina

Heureuse Méditerranée. Par l’intermédiaire d’Enrico Pieranunzi et de ses musiciens, la mer se fait poétesse. Consciente de sa beauté, attentive à l’activité humaine, moteur des mouvements du cœur, elle ne berce pas seulement le repos des bébés, elle console les âmes.

Le trio l’évoque avec tendresse sans être racoleur. Amateurs de cartes postales et de mandolines s’abstenir. Les 11 airs – tous aussi beaux les uns que les autres – sentent bon la vie.

Bien sûr, les musiciens saluent la beauté de ses paysages, véritables invitations à la contemplation et au rêve. (Canto nascosto, Lighea). Mais ils ne se limitent pas à cela.

The Kingdom, la pièce qui ouvre l’album, est magistrale. Elle résume admirablement bien l’album. Une grande beauté introspective puis, une légère animation. Le rêve laisse place à la majesté de la vie réelle. Les touristes ont regagné leur chambre mais la vie continue.

Car là réside la réussite de cet enregistrement: l’équilibre entre les paysages contemplatifs et le bouillonnement humain. Pas seulement le labeur, mais aussi les élans de la passion. Ainsi de O toi désir, une folle randonnée menée par un coureur dopé au désir amoureux. Ainsi de Un’alba dipinta sui muri, un air nostalgique nourri d’un souvenir douloureux, comme un visage aimé se dissolvant à la rosée du matin.

Le jeu des trois musiciens se complète à merveille. On est témoin de brillantes conversations à deux ou à trois, de judicieux contrechants et d’un accompagnement millimétré.

http://www.youtube.com/watch?v=2c986hPXxw8

Pieranunzi est un pianiste sobre mais inspiré. Mirabassi souligne avec grâce et chaleur la beauté des pièces. On ne dira jamais assez comment les jazzmen européens ont revitalisé la clarinette depuis les 20 dernières années. Sans oublier, bien sûr, Johnson qui fait preuve d’une grande musicalité tout au long de l’album.

L’absence de percussions ajoute à cette impression de douceur, comme si les musiciens ne voulaient pas réveiller la tempête qui peut gronder.

Heureuse Méditerranée, elle qui en a long à raconter sur l’âme humaine. Mais plutôt de le crier à la face du monde, ses troubadours ont choisi de le chuchoter. Après tout, il y a un bébé qui s’endort.

Le Top 50 de Frank (No 37): Enrico Pieranunzi, Racconti mediterrranei

Étiquette: EGEA

Enregistrement: 21 février 2000

Durée: 60:13

Musiciens: Enrico Pieranunzi (piano), Gabriele Mirabassi (clarinette), Marc Johnson (contrebasse)