L’évolution de Queens of the Stone Age

Flashback : 15 mai 2003, Centre Bell. On discute nonchalamment avec Jonathan Bergeron, d’Universal Music, et Anne-Marie Whithenshaw au parterre, quand un bruit assourdissant nous fait sursauter et reculer d’un bon pied. À peine moins que Marty McFly dans la séquence d’ouverture de Back To the Future

Par Philippe Rezzonico

Queens of the Stone Age, avec tous les guitaristes et le bassiste à l’avant-scène, venait de jouer une note. Une seule note. Un « twangg!!! » collectif digne d’une explosion atomique. Quand nous sommes sortis du Centre Bell ce soir-là, on parlait bien plus de QOTSA que des Red Hot Chilli Peppers.

Plus d’une décennie plus tard – et après les avoir vus plusieurs fois depuis -, les QOTSA qui se sont pointés sur les planches du Centre Bell, mercredi soir, ne sont plus exactement les mêmes.

C’est vrai pour ce qui est de la composition du groupe. Hormis Josh Homme, plus aucun musicien des débuts n’est de l’aventure. QOTSA, ce n’est pas un collectif soudé. C’est un groupe de musiciens interchangeables dirigé par un seul homme – excusez le jeu de mots facile -, comme l’est Nine Inch Nails par Trent Reznor.

N’ayez crainte, QOTSA peut encore et toujours décaper la peinture, comme ils l’ont fait en ouverture, après le décompte d’une minute que l’on voyait sur les écrans : 10, 9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2, 1… et c’est le triplé formé de l’explosive You Think I Ain’t Worth a Dollar, But I Fell Like a Millionnaire; le désormais classique No One Knows, qui reposait sur une ligne de basse lourde à souhait; et My God Is The Sun, noyée dans les faisceaux de couleur jaune. Comme entrée en matière, c’était béton. Pas pour rien que ce triplé amorce les prestations de QOTSA cet été.

Ce spectacle, je l’avais vu en version écourtée à Nyon, en Suisse, lors du festival Caribana, début juin. Dans un contexte de vacances (famille, pas de stylo, alcool), je n’étais pas sûr si l’impression de ruptures de tons perçue ce soir-là était si prononcée. Aucun doute après le deuxième service cette semaine.

Homme qui dit « let’s dance » avant que les QOTSH nous livrent Smooth Sailing, qui verse dans le funk. If I Had a Tail, presque accessible selon les standards du groupe, et Make It Wit Chu, au parfum pop irrésistible. Homme ne sent plus le besoin de matraquer le même clou tout le temps.

The Vampyre of Time and Memory, qui oscille constamment entre la beauté et la fureur, illustre peut-être le mieux les variantes proposées par Homme (assis au piano).

Curieusement, ces accalmies ne font que rendre encore plus percutants les brûlots comme Sick Sick Sick, Go With the Flow et, bien sûr, l’incomparable Song For the Dead qui a clôt le spectacle.

Le fait saillant de la soirée était toutefois survenu plus tôt, quand les QOTSA ont livré Better Living Through Chemistery. C’était quelque chose qui fusionnait à la fois une musique parfaitement maîtrisé et une atmosphère de fin du monde.

Oui, plus d’une décennie plus tard, QOTSA peut toujours décaper la peinture. Mais ce groupe est devenu bien plus que ça. Belle évolution, en vérité.