Deuxième journée de musique au Festival Osheaga. Après le marathon de la veille qui a laissé quelques séquelles physiques – la position debout durant plus de dix heures, ce n’est pas une bonne idée -, on voulait prendre ça plus relaxe. Un peu raté.
Par Philippe Rezzonico
En définitive, notre parcours aura quand même croisé celle de neuf groupes ou artistes. Un peu moins que les 13 bands de la veille, mais quand même… Amorcée sous un soleil de plomb, cette prise deux n’aura pas été épargnée par les éléments.
Contrairement à la veille, on a circulé un peu moins bien sur le site en après-midi, car il y a toujours plus de monde plus tôt les week-ends. Rien de majeur. La bonne humeur et la civilité étaient toujours au rendez-vous.
Un peu moins vrai sur le coup d’envoi du spectacle dynamité de Kendrick Lamar, vers 21h30. Grosse, grosse cohue et petite panique pour certaines spectatrices près de la barrière de dégagement du côté de la scène de la Rivière. Une vingtaine de festivaliers ont dû sauter d’urgence par-dessus cette dernière, car la situation aurait pu être problématique. Quand quelqu’un de mon gabarit (215 livres) se fait soulever de terre par un mouvement de foule, c’est qu’on est coincés pas pour rire…
Comme je n’ai vu certains spectacles qu’en partie et en bonne compagnie – c’est fou les gens que l’on rencontre sur ce site -, allons-y pour des considérations en vrac et quelques critiques plus étoffées.
Young the Giant : Quand le groupe a conclu une prestation de 50 minutes endiablée et fiévreuse avec My Body, personne n’était déçu. Soleil, canons à eau (il faisait chaud), ballons dans la foule : la quintessence d’un spectacle d’été rassembleur.
St. Vincent : Avec son ensemble (de cuir?) moulant et une nouvelle coupe de cheveux qui lui va à ravir, Annie Clark (St.Vincent) semblait être l’équivalent féminin 2015 du Elvis Presley 1968, du temps de la spéciale télévisée Come Back Special.
D’entrée de jeu, elle démontre son imagination. Durant la livraison de Birth In Reverse, elle avance ou recule à petits pas saccadés, tandis que sa bassiste fait de même, mais en sens inverse. L’effet visuel est original et ça colle parfaitement au titre de la chanson.
Bonne guitariste, la dame? Son instrument n’est certes pas un accessoire de scène. Son solo au terme de Rattlesnake était décapant à souhait. La pose, la gestuelle, le regard, la livraison. J’ai inscrit « Prince au féminin » sur mon calepin. Regard approbateur de mes amies Sylvie et Virginie.
Marrow avait du Led Zeppelin dans le nez. C’est alors que St.Vincent monte au sommet de son piédestal pour interpréter deux chansons. Du lot, c’est Prince Johnny qui nous renverse par la combinaison voix/intensité/musique. Une pimpante version de Digital Witness sera le signal de départ afin de contourner les deux grandes scènes pour aller assister à la prestation de Milky Chance, sur la scène de la Montagne.
Action Bronson? Pas vu.
Milky Chance : Très mauvaise idée que j’ai eue de changer de côté. J’avais sous-estimé la foule monstre qui voulait voir le groupe. Sur le flanc droit, placé dans le flot incessant du va-et-vient des festivaliers, la position n’était pas idéale, du moins, pour quiconque veut assister à une prestation en étant attentif. Après trois chansons, retraite et cap sur la scène Verte.
Christine and the Queens : Arrivés au sommet de la bute au moment où Christine and the Queens amorce sa prestation, je mesure à quel point il n’y a pas grand-monde. La veille, le site était presque inaccessible pour Chet Faker. Tant mieux pour nous. On peut s’installer du côté gauche, tellement proche qu’on n’a même pas besoin de regarder les écrans.
Comment Chrisitine pouvait-elle être aussi convaincante que lors du spectacle au Métropolis en février? En mettant la pédale au tapis. Dans son joli ensemble bleu marin, Héloïse Letissier (de son vrai nom) a dansé en synchro avec ses boys comme elle a toujours l’habitude de le faire.
Devant des convertis, il est vrai. Tous les expatriés français de Montréal étaient sur place. Au point marquer leur désapprobation quand Christine leur a demandé si elle devait s’exprimer en anglais.
« Moi et mon dress code », a-t-elle lancé, en enlevant sa veste alors que l’on se faisait cuire sur place. Elle est tordante, la Christine, quand elle commente durant ses chansons, notamment quand elle descend sur le plancher des vaches en réalisant qu’elle va salir ses baskets. Boule d’énergie, elle a enchaîné les Starshipper, Paradis Perdus, Pump Up the Jam et autres Saint-Claude avec un plaisir réel.
Tant pis pour les absents, Christine and the Queens a triomphé malgré tout.
Interpol et Patrick Watson : Retour vers les grandes scènes à petit pas, en raison du bris de sandale de Virginie. N’ayez crainte, tout le monde est sain et sauf… Au retour, la flotte se met à tomber au moment où je suis parti prendre une bouchée. Bref, c’est de la zone VIP média d’arrière-scène que je vois ce spectacle et une partie de celui de Patrick Watson sur écran. Pas question de faire de critique, ça serait injuste pour les deux groupes. Un spectacle, ça se regarde en face.
Weezer : Weezer ne devait être le groupe que d’un album à succès. La bande à Rivers Cuomo est encore là, plus de deux décennies plus tard. Et des succès, ils en ont à la pelle.
Ouverture sur la bombe My Name Is Jonas (1994, album éponyme bleu), enchainée avec la rutilante Hash Pipe (2001, album éponyme vert) et suivie par la solide Troublemaker (2008, album éponyme rouge). Chaque chanson baignée dans des lumières de couleurs liées aux pochette d’album. Concept.
Cuomo, qui avait l’air d’un étudiant bien mis dans le clip de Buddy Holly il y a deux décennies, a désormais des allures de prof universitaire avec sa barbe et ses lunettes… toujours dignes de Buddy Holly. Il n’aura finalement fait que changer de place dans la classe au cours des ans.
Dans les faits, ce fut un spectacle « best of » d’une durée d’une heure, quelque peu handicapé par des problèmes de son au début et par un manque de volume généralisé. Pas si grave dans ce deuxième cas, avec tous les ados de 1994, maintenant trentenaires, présents au parterre. Une vraie chorale de milliers de voix pour chanter Island In the Sun, Say It Isn’t So, Undone – The Sweater Song et Buddy Holly.
Même la nouvelle Go Away a reçu un accueil enjoué et j’étais vachement heureux d’entendre l’ultra mélodique (I You Wondering If I Want You To) I Want You To, pas une habitée des spectacles du groupe.
Les moments « cute » de la journée : La petite fille de Cuomo, Mia, huit ans, qui vient jouer des claviers durant Perfect Situation, et son petit frère, Leo, trois ans, muni d’une guitare en plastique, qui vient « jouer » à côté de son paternel durant Back To the Shack. Il fallait le voir tenter de toucher les pédales de guitare de son papa… Tordant.
Osheaga, festival familial au parterre et sur scène, n’en doutez pas.