Osheaga, jour 3: Lorde, Arctic Monkeys, The Replacements et Billie Joe

Lorde: le triomphe. Photo courtoisie evenko/Pat Beaudry

Outkast, Jack White, Arctic Monkeys, Skrillex, Lorde, The Replacements, Nick Cave & the Bad Seeds, Foster the People, Modest Mouse, J. Cole, Half Moon Run, Chvrches, Pusha T, The Kooks, Awolnation, Portugal the Man, Old Crew Medecine Show, London Grammar, Hospitality, Alex Nevsky, Temples, Mahaut Modino, Von Pariahs et Royal Blood.

Par Philippe Rezzonico

Présenté comme l’affiche annuelle du festival Osheaga (des plus grosses têtes d’affiches en ordre décroissant), mon parcours des trois derniers jours se décline ainsi. Seulement 24 shows, dont une bonne partie vus à moitié. Paresseux, je sais.

On a déjà discuté des deux premières journées sur ce site. On boucle la troisième en chronologie d’apparition, comme on le ferait dans un générique de cinéma. Concept.

The Kooks, 15h30 : On arrive à mi-chemin du set des Kooks qui font danser la foule au point que le degré de sueur, déjà fort élevé, est rapidement en hausse. Le groupe de Brigthon de Luke Pritchard possède une réelle propension à faire de la pop joyeuse (musique) dont les propos sont parfois à contre-courant.

The Kooks. Photo courtoisie evenko/Pat Beaudry

Mais lorsque tu joues près d’une demi-douzaine de chansons (Sofa Song, She Moves in Her Own Way, Ooh La, Seaside et l’irrésistible Naive) du disque (Inside In/Inside Out) qui t’a révélé au monde, tu fais un carton assuré.

Portugal the Man, 16h : Oui, il y a les emprunts à Pink Floyd (Another Brick In the Wall) et à Oasis (Dont Look Back In Anger), parfaitement intégrés à leur musique, qui font plaisir à des types dans mon genre Oui, il y a des chansons qui captent l’attention. Oui, il y a des jams. J’adore le jazz. Et ces types savent vraiment bien jouer.

Bref, à peu près toutes les composantes de Portugal the Man m’attirent. Pourquoi donc ça me laisse tiède? Mystère.

Chvrches, 16h50 : « Buzz », ai-je, entendu, dans la zone des médias. En effet, Chvrches (prononcez Chur-ches) a de quoi capter l’attention. Mélodiques à souhait, les compostions du trio écossais féru d’électro-pop.

Les pulsions et les montées en puissance des compositions maintiennent l’attention du spectateur, mais entre vous et moi, c’est la voix et l’allure de la chanteuse Lauren Mayberry qui soude le tout.

Temples, 17h50 : Parti tôt pour voir la moitié du set des gars de Royal Blood avant les incontournables Replacements, j’ai entendu la prestation de Temples, groupe britannique, en attente devant la Scène de la Vallée (moins de 150 mètres entre les deux plateaux).

Les anglais qui font dans le rock psychédélique n’ont pas ménagé la gomme : leurs salves de rock sont presque épidémiques. L’oreille avait du mal à s’en détacher. On va les revoir sur une scène bien plus spacieuse sous peu.

Royal Blood, 18h35 : Les brits auraient pu jouer plus longtemps, parce que leurs compatriotes de Royal Blood n’étaient pas prêts. Il aura fallu attendre plus de dix minutes avant que le duo de Mike Kerr (basse) et Ben Thatcher (batterie) commence sa – courte – prestation devant une foule nombreuse et compacte massée devant la plus petite scène d’Osheaga.

Mais en seulement trois chansons, j’ai pu mesurer le potentiel. Une guitare mordante, une batterie lourde et des références musicales qui englobent tout ce qui ressemble à du rock lourd depuis 40 ans. Des rivaux pour les Black Keys? Disque à venir le 25 août.

The Replacements, 19h20 : retour en quatrième vitesse vers les grandes scènes, tout en gravissant deux par deux les marches des escaliers qui séparent les deux zones. On arrive à temps pour voir les deux membres originaux des Replacements, le chanteur Paul Westeberg et le bassiste Tommy Stinson, ainsi que leurs musiciens (dont Billie Joe Armstrong, de Green Day) remonter le temps.

Takin’ A Ride, I’m In Trouble, Nowhere Is My Home, Color Me Impressed: les vieux routiers reformés après près d’un quart de siècle de pause ont su se montrer à la hauteur. Westerberg a trébuché sur quelques paroles, certes, mais le niveau d’énergie y était, Stinson s’amusait comme un petit fou et Billie Joe est resté en retrait, ajoutant du tonus aux chansons sans voler la vedette au groupe qu’il vénère.

Billie Joe Armstrong et Tommy Stinson. Photo courtoisie evenko/Pat Beaudry

D’ailleurs Billie Joe n’a jamais été présenté. Un monsieur est venu me demander : « c’est bien le chanteur de Green Day, non? » En effet. Bien vu monsieur.

Et tout le monde a dansé sans cesse, tant les fans de longue date qui n’avaient jamais vu le band (séparé en 1991) que les jeunes festivaliers qui étaient heureux d’acclamer un groupe d’une autre génération qui a inspiré tant des leurs. La plus belle image? Cette petite fille (deux ans et demie..) qui tapait dans ses mains avec un sourire ravageur. Rock n’ roll will never die…

Lorde, 20h20 : Quand j’avais 17 ans, les adolescentes de cet âge ne ressemblaient pas à Lorde. Aucune d’entre elles n’avait une telle voix, une telle dégaine, une telle présence. Ceux qui se demandaient si le jeune néozélandaise pouvait franchir avec succès le test des planches ont eu une réponse sans équivoque.

Habitée, investie, en plein contrôle de sa voix, le corps de Lorde réagit à la musique comme s’il était liée à cette dernière. Durant Biting Down et White Teeth Teens, elle tressaute à chaque pulsion, comme si une onde de choc la traversait.

Lorde donnait parfois l’impression d’être une marionnette retenue par des fils invisibles, ou d’être partie prenante d’une chorégraphie de La La La Human Steps. Mais chaque fois, la chanteuse retrouvait son aplomb instantanément. On connait des artistes qui ne proposent pas une telle maîtrise après dix ans de carrière.

Lorde: habitée, investie, intense. Photo courtoisie evenko/Pat Beaudry

Lorde s’est même permis d’interpréter Swignin’ Party, des Replacements. Bel hommage et grand honneur pour la chanteuse, nous a-t-elle dit. Lorde admet ne pas encore réaliser jusqu’à qu’elle point son art est devenu son métier. La plus grosse foule jamais massée sur le site d’Osheaga lui a fait comprendre à quel point cet art était universel.

Quand elle a interprété Royals, sa chanson-phare, un grand sentiment de plaisir a traversé l’échine de milliers de gens. Chapeau, jeune dame.

Arctic Monkeys, 21h20 : si bien des festivaliers se sont dirigés vers la scène pour aller entendre Lykke Li à l’autre bout du site, tout l’espace de la Scène de la Rivière était bondé pour les anglais d’Arctic Monkeys.

Arrivés sur scène sur l’instrumentale Are You Lonesome Tonight? (c’est quoi, cette tendance Elvis du week-end?), les boys se sont offerts une ouverture coup de canon avec le nouveau tube Do I Wanna Know? Une évidence crevait les yeux. Le disque AM a révélé les gars de Sheffield à un nouveau groupe d’amateurs et ils étaient légions sur place.

Alex Turner, d'Arctic Monkeys. Photo courtoisie evenko/Pat Beaudry

La bande à Alex Turner a bien intégré les nouveaux titres (Arabelle, Snap Out of It, No.1 Party Anthem) aux succès du début (Dancing Shoes, I Bet You Look Good On the DanceFloor) et aux autres tubes de l’entre-deux (Brianstorm, Teddy Picker, Fluorescent Adolescent).

Cohérente totale, musiciens solides, chansons accrocheuses : les anglais n’avaient pas volé leur place de choix. Superbe finale.