Spectacles 2012 (1) : les 10 meilleurs spectacles…d’ici

Marie-Pierre Arthur en feu aux FrancoFolies. Photo courtoisie FrancoFolies/Jean-François Leblanc.

Les ventes de disques battent de l’aile, mais si l’on mesure une année par la qualité de ses spectacles, la cuvée 2012 est au nombre des bons crus de récente mémoire.

Par Philippe Rezzonico

Que ce soit ceux d’ici ou d’ailleurs, force est d’admettre que bien peu d’artistes montent sur les planches sans pouvoir offrir une proposition conséquente à leur œuvre, bien structurée et étoffée, peu importe leur genre musical.

Des clubs aux arénas et aux stades d’ici et d’ailleurs, tout en passant par les spectacles à ciel ouvert, voici une rétrospective en trois volets portant sur les spectacles vus en 2012. Comme toujours, on n’a pas pu tout voir et on compte trop de soirées où l’on a dû faire des choix déchirants : le Centre Bell avec Radiohead ou la Place des festivals pour voir  Loco Locass?

Il ne faut pas se plaindre. C’est le prix d’une métropole (Montréal) et d’une province où l’on s’ennuie rarement quand vient le temps d’écouter et de vivre de la musique.

Aujourd’hui, les 10 meilleurs spectacles d’artistes d’ici – certains vus deux fois -, francophones ou anglophones. Du moins, ceux parmi les 175 spectacles que l’on a vus cette année…

1 – Leonard Cohen, Centre Bell, 28 novembre : La classe jumelée à la perfection : Voilà ce que nous a proposé Leonard Cohen avec sa nouvelle tournée Old Ideas, encore supérieure à celle de son retour sur scène après 15 ans d’absence des planches, en 2008. Au lendemain du premier spectacle au Centre Belle j’écrivais :

Cette fois, on voyait que Cohen avait retrouvé tous ses repères. Sautillant comme un gamin en entrant sur scène, courbé vers le sol en chantant avec ferveur (Everybody Knows), droit comme un chêne en jouant de la guitare (Who By fire), solennel, chapeau sur le cœur, en observant ses fabuleux musiciens livrer des solos inspirés, et transcendant en récitant des poèmes qui subjuguent l’assistance (A Thousand Kisses Deep) : Cohen était impérial.

Poésie, voix, classe et distinction: Leonard Cohen. Photo courtoisie Sony.

Debout ou à genoux, le poète montréalais le plus universel aura livré un marathon de près de trois heures à l’âge vénérable de 78 ans. Hallelujah!, Monsieur Cohen.

2 – Collectif (spectacle pour Denis Blanchette), Métropolis, 1er octobre : Comment se remettre à vivre après une tragédie comme celle qui a coûté la vie au technicien Denis Blanchette le soir de l’élection provinciale du 4 septembre? Tout simplement en réunissant la crème des artistes d’ici ayant un rayonnement international et en livrant l’un des spectacles les plus émouvants qui soient.

Céline Dion, émue, est venue interpréter L'amour existe encore en ouverture du spectacle. Photo Alain Décarie.

Arcade Fire, Céline Dion, Cœur de pirate, Patrick Watson, Louis-Jean Cormier, Martha Wainwright et consorts ont réussi l’exploit lors de cet événement unique dont le but était d’amasser des fonds pour la petite fille de Blanchette, bien seule désormais sans son papa.

Outre les émotions ressenties lors de ce spectacle unique, on accorde un coup de chapeau aux artistes qui ont donné généreusement de leur temps et un autre à Spectra qui a mis sur pied en quatrième vitesse cet événement au cours duquel tous les représentants des médias ont dû débourser les 80 $ requis pour accéder au Métropolis. Pas de touristes dans la place, donc, et c’était très bien ainsi.

Louis-Jean Cormier a interprété la rassembleuse Tout le monde en même temps. Photo Alain Décarie.

Avec, en toile de fond, une réflexion envers tous ceux qui dénigrent les «zzartistes» et «les gratteux de guitares carrés rouges» qui sont «subventionnés». Ces «zzartistes»-là, peu importe leur statut de vedette locale, nationale ou internationale, sont toujours les premiers à donner de leur temps pour une bonne cause…

 3 – Marie-Pierre Arthur, Club Soda, 13 juin : Fougueuse, enjouée et exubérante, Marie-Pierre Arthur a transformé le Club Soda en fournaise ce soir-là. Rarement de nouvelles compositions comme celle de son nouveau Aux alentours ont fait mouche comme lors de cette prestation qui avait tout d’un brûlot.

De l'énergie à revendre. Photo courtoisie FrancoFolies/Jean-Francois Leblanc.

Sa basse Hofner (comme celle de McCartney) avait des allures de Fender Stratocaster. Nous avons même eu droit à Jealous Guy, de Lennon. Une monumentale claque de rock québécois en pleine gueule offerte devant une foule en liesse.

4 – Richard Desjardins, Club Soda, 31 octobre: Trois jours après avoir vu son spectacle de L’Existoire couronné par un Félix, Richard Desjardins  faisait sa rentrée montréalaise au Club Soda. Jamais n’avait-on entendues les anciennes chansons de Desjardins si richement parées.

Desjardins, Claude Fradette, Karl Surprenant, Mélanie Auclair, Jean-Denis Levasseur et Tommy Gauthier ont utilisé l’arsenal suivant : guitares sèches et électrique, basse et contrebasse, ukulélé, banjo, violon, violoncelle, flûte à bec et traversière, trois saxophones différents, piano, harmonica, tambours et batterie.

Richard Desjardins, ses mots, son band, son existoire. Photo courtoisie Jean-François Leblanc/Coup de coeur francophone

Ce spectacle était un régal. Et comme Desjardins a annoncé qu’il s’agit de sa dernière tournée avec une formation musicale si imposante, ne ratez pas ça lors des nombreuses supplémentaires de 2013.

5 – The Barr Brothers, Club Soda, 22 février, et Métropolis, 1er juillet : Nous les avions vus avant, mais l’année 2012 fut celle de la consécration pour The Barr Brothers. Complètement subjugués étions-nous lors de leur prestation au Soda lors du festival Montréal en lumière.

Brad Barr, un guitariste inventif. Photo courtoisie Montréal en lumière/Victor Diaz-Lamich.

Et il ne s’agissait pas d’un grand soir éphémère. Quelque temps plus tard au FIJM, ils confirmaient le tout dans une salle encore plus vaste. Un groupe folk-rock qui qui comprend une harpiste a tout ce qu’il faut pour aller loin.

6 – Catherine Major, Club Soda, 16 février, et Théâtre Maisonneuve, 8 juin: Intense, éclatée, lumineuse… et parfois stressée, Catherine Major aura présenté tous ses visages lors de la tournée de son disque Le désert des solitudes. Le soir de sa première, au Club Soda, j’écrivais :

Totalement planante, habitée et placide avec Ma Voix (amorcée debout au micro), Petit début d’éternité (envoûtante) ou Sahara (splendide), Major peut se déchaîner, cris à l’appui, avec une version dynamitée de Saturne sans anneaux (formidable), reprendre La rue Madureira de Nino Ferrer avec une fougue adolescente, ou livrer Fais pas l’affaire et son phrasé proche du hip-hop dans un amalgame de funk.

Catherine Major a offert une performance digne de son intensité proverbiale lors de sa rentrée montréalaise. Photo courtoisie Montréal en lumière/Victor Lamich-Diaz

Quatre mois plus tard, les rares aspérités de ce premier contact avaient disparu pour une performance savoureuse au possible pour les FrancoFolies. Franchement, on buvait les paroles et on goutait toutes les nuances de cette musique qui nous va droit au cœur,

7 – Groovy Aardwark, Place des festivals, 9 juin : Je ne pensais plus les revoir et je ne suis pas convaincu qu’ils pensaient reprendre du service après sept ans d’absence. La belle surprise que voilà que ce spectacle dynamité de Vincent Peake et ses collègues.

Vincent Peake et ses collègues étaient en feu. Photo courtoisie FrancoFolies/Victor Diaz Lamich

C’était tellement pertinent de voir l’un des plus grands groupes hard francophone du Québec s’offrir un tel bain de foule. En espérant que ça ne soit pas le dernier.

8 – Arianne Moffatt, Rialto, 29 février, et Métropolis, 10 juin: Peu d’artistes du Québec sont capables de s’exprimer vocalement et musicalement avec le même panache. Ariane Moffatt est du nombre. L’impact des nouvelles compositions en anglais était percutant lors de son spectacle-lancement au Rialto et on était à un niveau encore supérieur aux FrancoFolies.

Ariane Moffatt, à l'aise en français ou en anglais. Photo Catherine Lefebvre.

Ariane savait pertinemment qu’un album bilingue allait la priver d’honneurs potentiels au gala de l’ADISQ plus tard durant l’année, mais elle a démontré que l’on allait devoir composer avec elle sur deux tableaux désormais. Magnifique réussite.

9 – Rufus Wainwright, Place des festivals, 28 juin : Ce n’est pas donné à quiconque de transformer la Place des Festivals en salon intimiste. C’est pourtant le fait d’armes accompli par Rufus Wainwright en ouverture du FIJM.

Affichant toujours sa superbe, flamboyant, intense, Rufus aura chanté avec ses tantes Anna et Jane, avec sa sœur Martha et il aura chanté des chansons de sa défunte mère Kate et même de son paternel, Loudon Wainwright, troisième du nom.

Vibrant et flamboyant. Du Rufus à son meilleur. Photo courtoisie FIJM/Jean-François Leblanc.

Un «rêve accompli» a dit Rufus sur scène. Bien content de l’avoir vécu tout éveillé.

10 – Lisa LeBlanc, un peu partout… : Impossible de rater la lumineuse Acadienne en 2012 (Oui, oui, je sais… Elle n’est pas Québécoise, mais elle fait partie de la famille…).

Lisa Leblanc au spectacle pour le festival de Petite-Vallée. Phoot Catherine Lefebvre.

Je l’ai vue au Lion d’or, aux Katacombes, sur la Place des festivals et à Tout le monde en parle. Bilan : Elle chante chaque chanson comme si sa vie en dépendait, même – et surtout – si cette vie est «d’la marde».

Jeudi : les 10 meilleurs spectacles…d’ailleurs

Vendredi : les 10 meilleurs spectacles…vus ailleurs