Ça faisait bien une demi-heure que Van Halen avait amorcé son spectacle au Centre Bell, jeudi, quand je me suis demandé pourquoi plus de la moitié des gens qui avaient des sièges dans les gradins restaient assis. Pourtant, les trois Van Halen (Eddie, Alex, Wolfgang) et David Lee Roth y mettaient vraiment du cœur. Et l’évidence s’est imposée d’elle-même : nous écoutions tous la radio.
Par Philippe Rezzonico
Forcément, tout le parterre était debout, mais dans un show rock, tout le parterre est debout, par définition. Dans certaines sections – dont la mienne placée à 75 pieds de la scène -, il y avait plus de gens assis que debout. Tout le temps.
Et on avait déjà eu droit à des bombes comme Unchained, des classiques style Running with the Devil, des titres vitaminés tels Everyone Wants Some et des riffs béton comme celui de Somebody Get Me a Doctor.
Une foule trop âgée ? Du tout. Moyenne dans la mi-quarantaine – plus jeune que les membres originaux du groupe, finalement – et beaucoup de jeunes avec leurs parents qui ont grandi avec VH.
Un groupe fatigué ? Vraiment pas.
Les qualités de showman de David Lee Roth sont intactes. Svelte, fluide, glissant sur sa « patinoire » privée au centre de la scène, Roth faisait tournoyer son pied de micro tel un Ninja manie son nunchaku et il avait une voix encore plus solide que lors des retrouvailles avec Van Halen lors du passage de 2007.
Eddie ? Il est encore capable de nous déverser des centaines de notes à la minute ou de nous offrir des riffs digne d’une tronçonneuse. Il a été plus expéditif – six minutes, chrono en main – lors de son solo de fin de soirée (on l’a déjà vu faire dix minutes), mais on va prendre six minutes précises comme celles-là plutôt que dix minutes brouillonnes comme lors du passage de 2004, du temps de Sammy Haggar.
Là où ma première impression s’est confirmée, c’est quand les boys ont offert leurs versions de Oh, Pretty Woman et You Really Got Me. Dix personnes – maximum – debout dans les 15 rangées devant moi ? Plus de doute.
Il faut croire que les amateurs sont tellement familiers avec ces titres qui ont fait les beaux jours de la radio FM des années 1970 et 1980, que les écouter comme à la maison a autant de sens que de les vivre en spectacle. Constat.
Écran sous-utilisé
Remarquez, peut-être que VH court un peu après… Avoir à ta disposition un écran de la dimension de ceux qu’on voyait au ciné-parc dans les années 1960 (im-men-se !) et ne pas s’en servir à ce point, c’est du gaspillage.
Sauf pour la vidéo ou Roth nous montrait ses chiens et ses moutons avant Ice Cream Man – c’est quoi ce truc ? – à aucun moment durant tout le spectacle une chanson classique ou un nouveau titre de l’album A Different Kind of Truth n’a eu droit à un clip fait pour les besoins de la scène.
Impeccables et nécessaires, les gros plans sur les mains fabuleuses d’Eddie quand il se paie des solos déments. Mais que du visuel du groupe qui joue devant toi durant près de deux heures? Au Stade olympique avec l’éloignement des fans, bien sûr. Mais dans un aréna où il y avait moins de 9000 spectateurs ? Comprend pas. J’imagine les Stones et la Madone avec un tel écran.
Remarquez, ça n’a pas gâché le plaisir. Certes, Van Halen ne peut prétendre rivaliser avec ce qu’il était il y a 30 ans, mais personne n’a démérité. Maintenant âgé de 21 ans, Wolfgang a pris de l’assurance à la basse, il n’y a jamais de problème avec Alex, David avait la forme et Eddie était en feu durant Hot For Teacher. Quant à Dance the Night Away, elle a permis à plein de gens de se rappeler que Van Halen peut être presque aussi pop que rock, quand il le désire.
Même la foudroyante Panama et la violente Ain’t Talking About Love n’ont pas fait lever tout le monde. Seule l’incontournable Jump, en clôture, y est parvenue. Mais là, tous les spectateurs s’étaient levés pour applaudir le band pour le rappel.
Les succès de la radio FM… Incontournables…Tellement inévitables en fait, que lorsque que j’ai rejoint ma bagnole une demi-heure après le spectacle et que j’ai mis le contact, la première chose que j’ai entendue en même temps que le moteur était You Really Got Me qui était en train de jouer à CHOM. Pas moyen d’y échapper.