Billy Tellier : le pince-sans-rire qui fait rire

Si tous les Napoléon de la Terre étaient devenus des Billy Tellier au lieu de se transformer en petits dictateurs du quotidien, le Monde s’en porterait beaucoup mieux.

Par Pascale Lévesque

Au lieu de déclarer la guerre, l’humoriste n’a pas fait grand cas de sa petite taille, sinon de devenir un pro de l’humour dans la vie comme sur scène. On peut dire que son premier exercice de One man show tape en plein dans le mille si c’est précisément cet état d’esprit qu’il souhaitait léguer au public.

La loi du plus fort, présenté en première au théâtre St-Denis mercredi, est l’aboutissement de 10 ans de carrière pour Billy Tellier. C’est le bon mot puisque sa griffe et sa binette ont déjà fait impression sur plusieurs « marques déposées », tant à la radio qu’à la télé, depuis sa sortie de L’École nationale de l’humour.

Un premier spectacle solo qui arrive donc à point nommé dans la carrière du jeune homme. Ne faut-il pas un minimum de 10 000 heures d’expérience pour maitriser un métier?

Assurance et proximité

Maitrise dans l’ensemble pas totale, mais Billy Tellier l’a certainement dans sa façon de livrer son texte, ses gags et ses anecdotes, dans un mélange d’assurance et d’espièglerie. On aime surtout ressentir cette impression de proximité en l’écoutant, comme si le cadre du spectacle d’humour avait disparu.

On découvre avec lui comment sa petite taille « de pénis d’éléphant en érection » – pile 5’ 3’’ – l’a conduit à l’humour, on imagine avec lui un nouveau pays, on chuchote à l’église, on se retrouve dans la jungle du magasinage un jour de soldes, on rend hommage au malheur, on pense se marier et on vieillit un peu.

Bref, on en fait bien des choses avec cet ami humoriste à la répartie affutée et imaginative qui nous raconte une suite d’épisodes anecdotiques de sa vie, et autres observations, dans une suite de numéros qui ne forment pas nécessairement un fil conducteur.

La base

De l’humour pour de l’humour. C’est ce qui, je crois, décrit le mieux La loi du plus fort. Quelques gags et thèmes sont convenus et traités avec peu d’originalité, comme par exemple dans le cas du premier numéro où l’humoriste se penche sur le fameux modèle masculin d’aujourd’hui, se demandant, « quand est-ce que l’homme a cessé d’être un homme? ».  Élémentaire, mon cher Watson!  Mais n’empêche, Billy Tellier, le bon vivant, nous surprend plus d’une fois dans le détour.

Notamment le fait d’avoir demandé à Vincent Vallières de lui composer une chanson thème, incidemment baptisée La loi du plus fort. Ou encore, plus encore, dans ce fantastique numéro du baptême de son filleul, alors que l’humoriste nous transporte dans une église…où il passera son temps à chuchoter, enfilant un chapelet de punchs de plus en plus drôles.

D’ailleurs, il avouera à la fin du spectacle que la genèse de ce sketch était simplement le fantasme exprimé à son metteur en scène de livrer un numéro d’un bout à l’autre en chuchotant. Une idée saugrenue qui s’est révélée être le meilleur moment de la soirée.

Sinon, rien de trop déroutant. Plutôt un spectacle techniquement bien construit, solide, avec des numéros clairs, pas trop courts, pas trop longs, élaborés avec le souci de bien les boucler.

Bref, le public n’a pas découvert l’héritier d’Yvon Deschamps dans le propos de Billy Tellier, ni l’héritier des Denis Drolet ou des Chick ‘N Swell, du point de vue de la surprise et de la façon de se réinventer.

Mais d’avantage un gars pince-sans-rire, qui aime rire et faire rire, et qui partage cette passion sur scène : parfois, c’est suffisant. À défaut de rire à se taper frénétiquement les cuisses – quitte à emprunter celles du voisin -, le public aurait été bien malheureux d’être cul-de-jatte mercredi soir.

—-

La loi du plus fort, avec Billy Tellier. Mise en scène de Christian Viau. Supplémentaires les 17 et 18 mai au Théâtre St-Denis.

Toutes les dates de tournées sur le site web de BillyTellier.