MONTREUX – Pendant des années, elle fut la plume derrière quelques-unes des chansons de Rihanna, Alicia Keys et Justin Timberlake. Puis, elle a tenté sa chance. Deux ans après avoir été révélée par Do It Like a Dude, Jessie J parcourt cet été les festivals d’Europe où elle démontre qu’elle a trouvé sa voie et sa voix…. à défaut d’avoir complètement maîtrisé l’art des planches.
Par Philippe Rezzonico
Dans un Miles Davis Hall bondé pour l’occasion, l’Anglaise était de passage jeudi soir au Montreux jazz festival. Excusez les appellations anglophones, ce sont les appellations officielles au festival suisse qui en est à sa 46e présentation en 2012.
La jeune artiste aurait probablement pu se produire à l’Auditorium Stravinski, l’autre salle plus vaste du complexe du festival sis sur les abords du lac Léman qui dispose d’une vue insensée sur les montagnes de Suisse et de France. Du genre, carte postale à couper le souffle.
Dans ce Miles Davis Hall plus large que profond et dont la capacité est visiblement inférieure à l’ancien Spectrum de Montréal, l’Anglaise s’est pointée avec un groupe décapant qui comprenait des choristes à la voix aussi puissante qu’elle.
Et Jessie J n’allait pas faire de quartier : ouverture sur Do It Like a Dude et Who’s Laughing Now dont les refrains ont été repris illico par la foule. Ses admirateurs internationaux – on a entendu parler anglais, italien et allemand dans le hall – ont été accueillis par un son ample, une voix porteuse et l’attitude frondeuse de la jeune dame, sa frange de cheveux de coupe de bonne famille faisant contraste avec sa tenue de scène sexy.
Justin Timberlake a dit que Jessie J a la meilleure voix du moment. Possible. Une évidence, elle peut la moduler à volonté…et elle la module parfois un peu trop. Quand elle s’offre Casualty of Love, il y a des inflexions qui ressemblent drôlement à celles de Céline Dion. Ce n’est pas un compliment.
Soul girl
En revanche, quand elle partage Nobody’s Perfect de concert avec ses choristes, Jessie J embrasse à plein l’héritage Soul et R&B. Une version dynamitée qui a charmé tout le monde, notamment la bande d’anglais (deux gars et trois filles) complètement bourrés qui étaient devant nous. Sa reprise de Never Too Much de Luther Vandross, enchaînée à Abracadabra, fut également impeccable.
Là où Jessie J se démarque de la plupart de ses rivales de la même génération, c’est qu’elle sait causer autant qu’elle sait bouger. Son introduction qui expliquait la genèse de l’excellente ballade Who You Are, qui parle d’émancipation et d’authenticité, était à point.
Là où Jessie J fait les mêmes erreurs que la plupart de ses rivales de la même génération, c’est qu’elle ne sait pas où s’arrêter. Bien gentil la complicité avec les fans, l’autographe de la pomme pour Ed, jeune admirateur qui va monter sur scène pour l’accompagner durant Price Tag – et se planter lamentablement -, mais elle a totalement torpillé le flow de son spectacle, avant de récupérer un tant soit peu pour la finale avec Laser Light et Domino.
Malgré les bémols, il est incontestable que la jeune Anglaise a un talent fou, une voix qui n’est pas sans rappeler Adele par moments et une allure qui fait penser à celle d’une Katy Perry. Pas de raison, donc, que sa progression à l’échelle planétaire s’arrête en si bon chemin.