Le triomphe du Pop Art

Deux millions cent soixante et un mille dollars. Non, ce n’est pas le salaire annuel d’un joueur défensif du Canadien de Montréal, mais le prix de vente atteint cette semaine d’un illustré imprimé sur du papier journal il y a 73 ans. Bien sûr, on parle ici du premier exemplaire d’Actions Comics dans lequel Superman est né.

Par Philippe Rezzonico

Ce n’est pas d’hier que les comics books d’antan se vendent pour des petites fortunes aux enchères. Mais on vient de franchir un seuil psychologique avec la première revente de l’histoire supérieure à deux millions.

En fait, c’est la progression des prix de rachat qui étonne depuis quelque temps. Cela a pris plus de 70 ans après la naissance de Superman avant qu’un exemplaire franchisse la barrière du million de dollars. Le 22 février 2010, un Action Comics # 1 (condition 8.0) se vendait pour un million $ ferme.

Trois jours plus tard, un exemplaire de la naissance de Batman, Detective Comics #27 (condition 8.0) était revendu 1, 075 million $. Le 30 mars 2010, ce fut un autre Action Comics # 1 (condition 8,5), qui trouvait preneur à 1,5 million $, et puis celui de cette semaine, évalué à 9.0. Une condition exceptionnelle pour n’importe quel illustré ayant plus de 30 ans d’âge. Imaginez 70 ans…

Et ça risque de se poursuivre à la hausse. Le marché du collectionneur de prestige, longtemps limité au milieu de la peinture et des œuvres d’art lors des siècles précédents, a pris de l’expansion dans la deuxième moitié du XXe siècle : illustrés, cartes sportives, photos, chandails et objets autographiés dans les milieux du sport, etc.

Et celui du comic book croît à une vitesse exponentielle pour quelques raisons. Cela fait plus de 40 ans qu’un ouvrage de référence (Overstreet Comic Book Price Guide) fait état des fluctuations de ce marché particulier. Mais depuis l’an 2000, une firme a bouleversé les conditions de revente.

La garantie

Certified Guaranty Compagny (CGC) est devenu l’expert indépendant en évaluation des illustrés américains, comme le sont des spécialistes du genre en peinture, pour la monnaie et la philatélie. Un bouquin évalué – et scellé – après expertise voit sa valeur majorée de façon substantielle.

Des exemples ? Un exemplaire des Avengers # 4 (retour du Captain America), paru en 1963, évalué Fine + selon le Overstreet Guide (environ 550 $) s’est vendu 1, 400 $ en 2009 après avoir obtenu une évaluation de 7.0. Spider-Man # 301 (Near mint, 20,50 $) a été revendu 735 $ après avoir reçu une certification de 9.8.

Dans les faits l’évaluation d’un solide connaisseur et des spécialistes de CGC sont sensiblement les mêmes. Personne ne va confondre un Very fine pour un Near mint. Un œil exercé voit tout de suite la différence. Mais pour l’acheteur potentiel, le fait que CGC ait confirmé la condition et scellé le bouquin assure la qualité du petit journal de papier pour la personne qui aligne des milliers de dollars. Garantie.

Bref, s’il ne faut plus s’étonner d’apprendre qu’un Picasso ou un Monet s’est vendu plus de 100 millions $, on a l’impression que des comics de plus d’un million $, on va en recenser quelques-uns dans les prochains années.

De là-haut, Andy Warhol doit bien rigoler.