On se croise et on s’aime

« Il n’en faut pas plus pour avoir du plaisir. » Mmm… Argent ? Sexe ? Non. Consentement. « Il regarde chez les voisins avec convoitise. » Ah… Voyeur ? Non plus. Échangiste. « Elles mettent en scène beaucoup de bouches et de mains. » Mmm… Partouze ? Oui ! C’est ça.

Par Philippe Rezzonico

Je n’ai jamais été trop bon dans les mots croisés traditionnels. Trop souvent, j’ai l’impression que les définitions sont plus subjectives que concrètes et cherchent à nous égarer. Point de vue personnel s’il en est un. Mais il faut croire que je ne suis guère plus doué pour résoudre les grilles du livre Mots croisés érotico-humoristiques – 50 grilles pour amants de la langue, de Frédérique Tiéfry. Sauf qu’à l’arrivée, on s’amuse ferme.

Paru aux éditions Goélette, le petit bouquin rouge contient 50 grilles où la thématique principale se veut l’érotisme sous toutes ses variantes. Coquin sans être vulgaire, érotique sans être porno, le livre devrait séduire les adeptes de ce passe-temps qui désirent résoudre une définition qui va mener à autre chose que « construction », « horloge » ou « lavage », quoique…

C’est d’ailleurs un peu l’intention de départ la créatrice du bouquin. Après des années passées à créer des mots croisés « purs », elle a eu l’envie de « prendre son pied en toute liberté et en toute impunité ».

Il faut noter qu’en ce qui a trait aux mots croisés, Frédérique Tiéfry est tombée dans la marmite très jeune. Lorsqu’elle était adolescente, elle voyait sa mère en créer. Mais c’est presque par hasard qu’elle s’est mise à en faire elle-même.

Un quart de siècle de grilles

« Je n’ai rien fait. C’est arrivé. Je n’avais rien espéré, rien demandé, dit-elle, du concours de circonstances qui a fait qu’elle a commencé à concocter des grilles de mots croisés il y a un quart de siècle, une fois par semaine. C’était un job tripant qui me demandait de cinq à six heures de travail. »

Avec des recueils entiers et des grilles de mots croisés livrées sur une base hebdomadaire, l’aventure s’est poursuivie durant des années pour celle qui bâtit encore ses grilles à l’ancienne.

Mots croisés, qualité de la langue et érotisme: Frédérique Tiéfry fusionne les trois éléments. Photo courtoisie.

« Je fais toujours mes grilles à la main et non  pas avec un logiciel. C’est probablement l’une des raisons qui font que l’intérêt y est toujours. Quand tu mets toi-même les mots qui vont dans les grilles, tu choisis ceux qui sont les plus inspirants à définir. »

Si l’amateur de mots croisés a un réel défi quand vient le temps de se livrer à son passe-temps, on se dit que le défi pour le verbicruciste réside dans la mise en place de la grille. N’y a-t-il pas une forme de routine ?

« Absolument pas. Faire les grilles avec les mots, c’est « mathématique », mais les définitions relèvent de la création. La grille est pas mal plus facile à faire que les définitions. »

Français 501

Résoudre des mots croisés est à la portée de tous, du moins selon la difficulté de la grille. En revanche, ce n’est pas tout le monde qui peut en confectionner un. Parmi les qualités essentielles, il faut être impeccable au plan de l’orthographe, maîtriser la compréhension de texte et posséder une culture étendue. Pas à la portée de tous, mais pas un problème pour la Québécoise originaire de Belgique dont la profession principale est d’être réviseuse.

Comme des tas de bonnes idées, celle de créer des mots croisés érotico-humoristiques est née autour d’une table et d’un repas bien arrosé. Mais il y avait des paramètres que l’auteure tenait absolument à respecter.

« J’insiste, c’était important que ça soit humoristique, drôle, coquin… Il ne fallait surtout pas que ça soit du porno. En tout cas, personne ne va s’offrir une branlette en faisait les mots croisés contenus dans ce livre ! Il y a le plaisir libertin de jouer avec les mots et de jouer avec la langue. Le livre s’adresse avant tout aux amateurs de mots croisés qui veulent rire un bon coup. »

On peut néanmoins penser qu’en raison de la thématique… universelle, disons, l’original recueil pourrait attirer un lectorat pas nécessairement féru de mots croisés de prime abord.

« Peut-être, mais je ne sais pas qui est mon « lectorat » dans ce cas précis. Je n’ai pas le souvenir d’avoir vu de mots croisés de ce genre au Québec. J’ai fait des recherches Internet, j’en ai parlé à des gens du milieu de l’édition et je n’ai rien trouvé d’équivalent. J’ai l’impression d’offrir une proposition différente. »