Que le vrai Pascale Picard Band se lève

Pascale Picard faisait sa rentrée, jeudi soir. Photo d'archives. Courtoisie Alain Décarie.

Avez-vous vu le Pascale Picard Band lors de la tournée de Me, Myself & Us ? Bien. Étiez-vous au Club Soda, jeudi, pour la rentrée montréalaise du Pascale Picard Band, virée A Letter To No One ? Si oui, vous devez arriver à la même conclusion que moi : ce n’est plus le même band.

Par Philippe Rezzonico

Ce constat –  déjà perceptible lors du lancement du nouvel album au printemps dernier – va cette fois au-delà des changements de personnel et des nouvelles chansons. Le Pascale Picard Band d’antan possédait une esthétique rugueuse et une fougue presque rageuse qui allaient plus loin que le look punk d’alors.

Comme vous, j’ai souvent vu ce groupe au Québec, mais je l’ai surtout vu mettre à ses pieds une foule pas du tout gagnée d’avance dans un show offert à Calgary (Junos 2008) après le coup de minuit. Ça ruait dans les brancards ! J’ai vu ce même band lors d’une courte prestation offerte à l’ambassade canadienne de Los Angeles, durant les Grammys. Croyez-moi, le personnel de l’ambassade avait peur pour sa vaisselle de luxe.

Je me suis demandé durant une bonne heure où il était ce band-là. Était-ce le trac de la rentrée montréalaise ? Peut-être. Pascale a même lancé : « Ben, chu à l’aise pour vrai, là ! » Le hic, c’est que nous avions déjà franchi la mi-parcours du spectacle.

Multiples boudes

Faut dire qu’il y avait une combinaison de plusieurs facteurs défavorables. Le choix de Five Minutes pour ouvrir le spectacle n’était pas idéal. Pépère. Bien sûr, il s’agit de la tournée de A Letter To No One. Mais de là à jouer les 14 chansons de ton disque ? Non, 13, en fait, puisque le groupe a escamoté l’un des nouveaux titres au rappel pour offrir Strangers, des Kinks (excellente version), que le band a enregistrée pour les besoins de la série télévisée Trauma.

Mais l’ultime bourde, c’était le parterre avec tables et chaises : totalement inutile quand la moyenne d’âge du public est à peu près celle de la jeune chanteuse. Cette décision a tué ce show. Point. Au Grand théâtre de Québec l’autre soir, on avait laissé un espace réservé à l’avant pour les spectateurs qui voulaient s’éclater. On aurait dû faire de même. C’était frustrant d’entendre les livraisons pourtant bien senties de Gate 22, Hell Is Other People et A While devant un public immobile.

Tout était bien joué (sacré bon band, ça), les éclairages étaient impeccables et recherchés (superbes faisceaux de lumière durant Gate 22), Pascale y mettait du sien (la voix était au poste), mais, comme disent les anglais : No vibe. Même la venue de Damien Robitaille pour le duo de Nobody’s Here To Break Your Heart est tombée à plat.

Pascale Picard et son groupe seront de retour, ce soir, au Club Soda. Photo d'Archives. Courtoisie Alain Décarie.

Et puis, l’étincelle. Avec The Gap. La plus U2esque des chansons de Pascale, lancée à fond la caisse avec des éclairages percutants. Et là…  Miracle. Un, deux puis trois spectateurs se sont levés. Et ça a levé. Enfin ! Annoying, presque trash, a suivi et a balayé la salle. On voyait le regard de Pascale qui se disait : «  Ça y est ! »

Dites-vous bien ici que ce n’est pas exclusivement parce qu’on parle de chansons rythmées. Dans un show, ça passe ou ça ne passe pas. Ça défie toute analyse. Et là, soudainement, tout passait, incluant le rappel de trois chansons.

Tout le groupe s’est déplacé à l’avant-scène sur une même ligne perpendiculaire aux spectateurs, mandoline et tambours inclus. Une bonne idée arrivée sur le tard… Les musiciens étaient dans les faits à peine plus proches que durant le reste du spectacle, mais le contact était établi. Là, on aurait souhaité que ça dure plus longtemps.

Je révise mon jugement du départ ? Du tout. Les correctifs de logistique (séquence des chansons, configuration des salles), le PPB peut les appliquer n’importe où, n’importe quand.

Mais ce groupe plus étoffé qu’auparavant au plan musical semble avoir perdu une partie de son identité et de son attitude d’antan au profit d’une production léchée et d’une personnalité quelque peu conformiste.

Et quand on sait que le PPB – qui n’avait aucune attente en 2007 – a vendu 300, 000 albums de Me, Myself & Us dans un marché du disque sclérosé et que A Letter To No One n’est écoulé qu’à 20, 000 exemplaires après six mois de mise en marché, on se dit que l’ancienne approche avait du mérite.