Caracol: chaud mardi

Caracol, sa guitare et son catalogue de chansons bilingues à L'Astral. Photo Alain Décarie.

Carole Facal, alias Caracol, l’a souligné elle-même avant d’interpréter Blanc mercredi. Une chanson portant sur l’hiver quand tous les flocons de neige ont été anéantis par un mercure de 25 degrés au centre-ville, ça torpille ton concept. Un mal pour un bien. Le spectacle que présentait Caracol à L’Astral convenait finalement mieux à une soirée chaude.

Par Philippe Rezzonico

Peut-être bien parce que cette performance n’était pas exactement ce à quoi on s’attendait, ce qui n’est jamais une mauvaise idée en définitive. La scène est là pour surprendre. Les chansons de Blanc mercredi, forcément, étaient attendues. Et l’intégralité de l’album (dix titres) était au menu.

On a donc été bercé par la splendide J’ai soif, chanson pop irrésistible qui repose sur une mélodie doo-wop que l’on fredonne avec les «la-la-la» d’usage, Nous avons trempé à plein dans l’indie rock avec Certitudes et sa guitare incisive, et nous avons bu jusqu’à la dernière goûte la magnifique Quelque part, chanson tirée du film Starbuck qui a été couronnée d’un prix Génie il y a dix jours.

Caracol avait toutefois décidé d’inclure plein de nouvelles chansons en anglais parues sur un petit EP que l’on venait à l’entrée de la salle. Ajoutées aux quelques titres anglophones déjà inclus sur Blanc mercredi, ça nous menait non pas à un spectacle francophone parsemé de quelques chansons en anglais, mais bien à une performance bilingue pratiquement équilibrée entre les deux pôles.

Bon calibre

Non, non… Ne cherchez pas de faux débat ou de controverse. Ce n’est pas là où je veux en venir. N’importe quel artiste vous dira à quel point interpréter dans deux langues distinctes en alternance est un exercice ardu en raison de la diction et la phonétique. Offrir un show bilingue du calibre de celui offert à L’Astral, ce n’est pas donné à tout le monde. Mais Caracol caracole – en effet – d’un univers à l’autre avec une aisance et une assurance remarquable.

Instrumentation organique pour Caracol. Photo Alain Décarie.

Quand elle chante en français, son timbre se couche sur des compositions pop (Feu d’artifices), folk (La route) ou de pure chanson française (Beauté terrible) joliment arrangées. Quand elle s’exprime en anglais, on a l’impression d’entendre Feist (Strange Film), les Supremes en mode folk (All the Girls, avec l’apport d’Amélie Mandeville et de Audrey-Michèle Simard) ou carrément un Kingston Trio féminin, quand les filles reprennent Tennessee Me, des Secret Sisters. Summer Blues et Horshoe Woman, plutôt mordantes, ont accentué les enrobages blues et country.

Le bivouac acoustique aura également permis d’offrir Viens vers moi en mode minimaliste (belle contribution de la foule) et La chanson de Prévert, Philippe B et le violoniste Marc Papillon venant s’ajouter au groupe pour livrer le classique de Gainsbourg dans une mouture terroir comme on l’entend rarement. Solide.

Ce commentaire s’adresse autant au batteur Justin Allard et au guitariste Manuel Gasse qui ont tenu le fort alors que c’était Caracol, sa bassiste (Mandeville) et sa claviériste-percusionniste (Simard) qui ont fait le spectacle, cette dernière étant la gentille « tête de turc » des anecdotes de tournées.

Santé! Photo Alain Décarie.

Souvent, les gags récurrents ont bien préparé la table pour les interprétations à venir, mais parfois, on ne savait trop si la chanteuse tentait de chasser la nervosité tant certains enchaînements étaient brouillons. Et ce n’est pas la faute des martinis, elle n’en a bu qu’un seul sur scène.

Cela dit, après avoir vu cette prestation, on se dit que l’artiste qui chante en anglais sans aucune pointe d’accent a une sérieuse carte à jouer sur le marché anglo-saxon. Et pourquoi pas ? Après tout, elle a déjà été une vedette mondiale de la musique du monde.