Soleil éclatant et mercure estival. Conditions idéales pour une virée en soirée tous azimuts. Virée, qui comme cela survient presque à chaque année, faisait la part belle aux femmes d’ici et d’ailleurs.
Par Philippe Rezzonico
Emel Mathlouthi
La chanteuse Emel Mathlouthi s’est-elle trompée de festival, comme le faisait remarquer un collègue? Il est vrai qu’avec moins de 100 spectateurs dans le Club Soda au moment où elle est montée sur scène, il fallait admettre que ce n’était pas l’affluence pour la Tunisienne qui a trouvé l’amour au Québec il y a trois ans.
Mais que l’on se dise qu’elle aurait été plus logiquement à sa place à Nuits d’Afrique ou à un festival de nouvelle musique n’y change rien. Avec sa voix phénoménale, puissante et flexible, Mathlouthi occupe tout l’espace et charme sans coup férir.
Interprétant ses chansons en arabe, en anglais et en français, la chanteuse polyglotte hypnotise les spectateurs avec sa gestuelle appuyée qui rappelle celle des danseuses de l’Afrique ou du Moyen-Orient.
La musique repose sur des claviers et une batterie le plus souvent électronique où les pulsions lourdes ont la cote, ce qui offre un contrepoint certain avec le chant lisse et filé.
Ironiquement, celle qui est venue interpréter ses anciennes et nouvelles chansons sans controverse (rappelez-vous le débat du franglais), a affiché son désir de « casser et les attentes et les limites » et qu’elle était voulait être reconnue pour la qualité de ce qu’elle faisait plutôt que de « porter mon drapeau », car elle estime ne plus être capable de représenter toutes « les ethnicités » de son pays.
C’est pourtant ce qui fait son charme et toute sa singularité.
Amélie Veille
On quitte avant la fin pour aller voir Amélie Veille sur la scène Ford qui présentait les nouvelles chansons de son disque Les moments parfaits, paru en matinée, et qui a fait l’objet d’un lancement à l’Astral sur le coup de midi.
Conditions tout aussi parfaites pour apprécier les nouvelles chansons. Constat évident : le premier extrait, Je prends tout de toi, est taillé sur mesure pour avoir le même genre de succès radiophonique que Mon cœur pour te garder il y a quelques années. Et Le temps perdu, avec son irrésistible phrase : « le temps perdu est le seul qui compte » est savoureuse à souhait.
Le clip de Je prends tout de toi, dévoilé lors du lancement résume fort bien l’univers de la Québécois qui est désormais enracinée sur deux continents, tant au plan personnel que de la collaboration musicale.

Amélie Veille (notamment avec Antoine Gratton, à droite) a présenté ses nouvelles chansons. Photo courtoisie FF/Victor Diaz Lamich
Sur cet aspect, les chansons de l’album réalisé par Antoine Gratton ont bénéficié de l’apport de collègues. Comment s’habillent les filles, interprétée en duo avec Andréanne A. Malette, et Ton côté du lit, avec Maxime Landry, ex-coloc d’Amélie Veille, s’avèrent probantes et les deux artistes étaient partie prenante du lancement et de la prestation sur scène.
Le « festival « Amélie Veille », en définitive, aura donc duré une dizaine d’heures au sein des FrancoFolies.
Ariane Moffatt
Ariane Moffatt avait d’entrée de jeu annoncé la couleur, aux couleurs de l’arc-en-ciel, pourrait-on ajouter : son grand spectacle extérieur allait être dédié aux victimes de la tuerie homophobe d’Orlando, survenue le week-end dernier.
« Je n’ai pas le goût d’attendre trop longtemps avant d’afficher mes couleurs », a-t-elle lancé après seulement sa deuxième chanson, en se drapant du drapeau LGBT arc-en-ciel avant d’interpréter Les tireurs fous.
Cette chanson de l’album 22h22 a été écrite il y a deux ans, avant les tragédies de Paris, de Bruxelles et d’Orlando. La Québécoise se désole de devoir la dédier chaque fois qu’il y a des tueries liées au terrorisme ou à l’homophobie depuis lors. On a néanmoins senti un grand courant de solidarité passer dans l’immense foule massée sur la place des Festivals quand elle l’a chantée.
Mais le recueillement musical a fait place au plaisir débridé avec une version vitaminée de Tous les sens et un remix de Let’s Dance, de Bowie, avant Debout. Tout le monde était debout, mercredi soir, aux FrancoFolies.
L’attaque de Louise
Je ne suis pas resté jusqu’à la fin, car j’avais manqué Louise Attaque la veille, because, présent à The Cure au Centre Bell. Il y a trop de bons spectacles à Montréal ces jours-ci…
Mais comme le trio de choc et leurs collègues offraient deux spectacles au Francos pour leur retour, il ne fallait pas rater ça.
Au fait, étions-nous aux Francos de Montréal ou de La Rochelle? La diaspora de l’Hexagone était largement majoritaire et les refrains de Ton Invitation, Léa et autres Savoir étaient repris à l’unisson, comme si nous étions à Paris ou à Marseille.
Si les amateurs se massaient, bien sûr, pour entendre les classiques de Gaëtan Roussel (guitare), d’Arnaud Samuel (violon) et de Robin Feix (basse), l’écoute à chaud du nouvel album Anomalie, s’est avérée plus que satisfaisante.
Rarement un groupe concocte un album après ses années de gloire où les nouvelles compositions – à défaut d’être connues – sont de qualité similaire avec celles du passé. Anomalie, la chanson-titre, est digne d’un ver d’oreille. Ses qualités mélodiques étaient décuplées par l’effet monstre du jeu de lumière.
La ligne de basse de Reix durant Si l’on marchait est tout simplement irrésistible, mais c’est L’insouciance, son texte, sa musique et son interprétation qui m’ont jeté par terre. Une grande, grande chanson qui mérite ça place au soleil pour les décennies à venir.
On pouvait donc doublement faire la fête quand Amour, Les nuits parisiennes et l’immortelle Je t’emmène au vent ont balayé le parterre en folie du Métropolis. Et le balcon, aussi….
Louis Attaque, visiblement, est de retour pour de bon. Une fiche de bonne nouvelle et de magnifiques retrouvailles.