
«As-tu toujours envie de m’entendre chanter?»
Claude Dubois a volontairement fait une pause juste après avoir prononcé cette phrase de la chanson Depuis que j’suis né, samedi, tôt, en début de sa deuxième partie au théâtre Maisonneuve. La clameur de la foule n’a laissé planer aucun doute.
Par Philippe Rezzonico
Pas étonnant, venant de la part d’admirateurs de longue date qui ont payé leur billet et qui, visiblement, assistent à des concerts de Dubois depuis des décennies. Mais n’eut été le devoir de réserve du critique, j’aurais probablement joint ma voix aux leurs. Pourquoi? Parce que Dubois ne fait pas que chanter. Il performe au plus haut niveau.
J’ai beau l’avoir vu souvent, son dernier concert à mon agenda remontait à 2017, aux Francos, justement. Or à l’époque, il venait tout juste d’avoir 70 ans. Il en a désormais 78, et dans cette décennie, il n’est pas rare de voir – et surtout d’entendre – un chanteur perdre du lustre et du tonus. Encore plus vrai quand on a vécu un cancer.
Toutes mes craintes se sont envolées en un claquement de doigts en première partie tant Dubois possède encore un niveau de puissance vocale qui peut rivaliser avec Tom Jones. Rien de moins. Et si son timbre affiche quelque peu le passage du temps, sa qualité d’interprétation n’a rien perdu de sa superbe.

Et comme Dubois – accompagné de Julie Lamontagne (piano, claviers), Kaven Girouard (guitare), Richard Deschênes (basse) et Tony Albino (batterie) – possède un nombre phénoménal de chansons qui vont des monuments aux classiques en passant par les immortelles, assister à l’un de ses concerts est encore et toujours l’équivalent d’écouter un juke-box farci de grands succès.
La vivifiante Bébé jajou la toune, le rock assumé du Mangeur d’étoiles, la splendide Femme de société, la quête de jeunesse de Plein de tendresse et l’universelle Comme un million de gens ont transporté les festivaliers à divers moments de leur vie en première portion de prestation. Il y avait tellement de chansons majeures du répertoire de Dubois au menu (également Pas question d’aventures, En voyage) que le non-initié aurait pu croire que le vétéran serait à court de matériel après l’entracte.
Pas une seconde.
L’impeccable et dense reprise de Léo Ferré sur les textes du poète Rutebeuf (Pauvre Rutebeuf), le doublé de Femmes ou filles et de Femmes de rêve, J’ai souvenir encore, l’époustouflante Si Dieu existe (coup de cœur assuré chaque fois) et l’immense Blues du businessman étaient toutes au programme en deuxième partie. Chacune d’entre elle a été salué par une ovation debout du public qui a été hautement participatif en sifflotant les mélodies et en chantant parfois les refrains à la place de Dubois qui savourait chaque seconde.
Ce concert fut un véritable tour de force vocal

La consécration de Lou-Adriane
Je suis sorti de la PdA à temps pour voir la finale du couronnement de Lou-Adriane Cassidy sur la grande scène extérieure en ce samedi soir.
Ayant vu ce concert en janvier (Théâtre Beanfield) et en mai (festival Santa Teresa), il n’y avait aucun doute quant au verdict populaire. Des milliers de jeunes femmes qui se reconnaissent à travers la chanteuse québécoise étaient massés devant la scène que Cassidy a quitté pour monter sur la clôture de sécurité lors de l’interprétation de Entre tes jambes.
Après une déchaînée version de La pluie ne tombe jamais sur toi avec le guitariste Thierry Larose, elle a conclu le concert avec Ça va, ça va drapée d’un drapeau du Québec qui portait son nom.

«Soyez ouverts, soyez ambitieux et soyez ouverts», a-t-elle dit, dans un plaidoyer pour la chanson québécoise.
Avec elle, Larose et l’autre membre du trio Le Roy, la Rose et le Lou (p), Ariane Roy, qui est venue chanter avec elle plus tôt durant le concert, l’avenir semble prometteur, plus que jamais.