Samara Joy : quelle joie, quelle voix!

Samara Joy/Photo courtoisie FIJM

Le premier grand frisson est survenu à la fin de la deuxième chanson proposée par Samara Joy, samedi soir, à la Maison symphonique, lors du Festival international de jazz de Montréal.

Par Philippe Rezzonico

En conclusion de Beware My Heart, l’Américaine a monté la note à une cime insensée avant de la maintenir au sommet durant une quinzaine de secondes, puis, de redescendre au niveau des mortels, le tout, sans jamais déraper, avec une maîtrise absolue.

Dans la rangée N au parterre où étaient installés quelques scribes, les réactions furent unanimes et m’ont rappelé celles vécues avec les confrères Sylvain Cormier et Alain Brunet, il y a près de 20 ans, lorsque Barbra Streisand avait conclu sa première interprétation au Centre Bell en ayant changé d’octaves en chemin.

Nous étions à ce niveau de performance et de qualité, samedi, avec la jeune afro-américaine âgée de 25 ans. Soufflés, étions-nous.

Blanche-Neige avait ses sept nains. Samara Joy avait avec elle sept musiciens du tonnerre aussi habiles avec leurs instruments que magnifiquement fringués. La classe. Bien mieux, le saxophoniste ténor Kendric McCallister (solo ébouriffant durant It’s the Little Things That Mean So Much) et le tromboniste Donovan Austin (tout en précision et en retenue) sont aussi des arrangeurs hors pair.

Passé et présent liés

Il fallait entendre certains classiques (Round Midnight, I Got It Bad (and That Ain’t Good), Left Alone, Dreams Come True) avec de nouvelles parures et ornements qui conféraient un second souffle à des compositions créés avant la naissance de presque tous les spectateurs présents à la Maison symphonique.

Il était d’ailleurs intéressant de voir la position des musiciens sur scène. Les cuivres (saxophones alto et ténor, trompette, trombone) étaient placés comme le sont les cordes au sein d’un orchestre classique et non pas à l’arrière-plan, derrière la contrebasse et la batterie. La touche de modernité se mesurait autant dans les arrangements que dans la disposition sur les planches. Mention spéciale, rayon solos, au trompettiste Jason Charos.

Impossible au terme des 80 minutes (un peu court vu qu’il n’y avait pas de première partie) de prestation de ne pas penser à Ella Fitzgerald. Samara Joy a une voix plus grave que la légende du jazz au même âge, mais ses inflexions de voix, son phrasé et sa manière de faire du scat (No More Blues) ont des affinités évidentes avec la grande Ella.

Mais si assister à une prestation de Samara Joy rime avec performance tant elle peut élever sa voix dans la stratosphère, cette dernière ne cesse de servir les compositions. Ce n’est pas que pour impressionner la galerie, mais bien pour faire passer une émotion palpable.

Et elle n’a que 25 ans…

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