Pour un groupe qui a évité la scène durant des décennies, Steely Dan fait du rattrapage depuis quelques années. Son passage mercredi soir au Théâtre St-Denis était son troisième à Montréal depuis 2008 et Walter Brecker n’a peut-être pas tort quand il dit qu’il s’agit peut-être du meilleur band de Steely Dan à avoir jamais foulé les planches.
Tout coulait de source dans la salle de la rue Saint-Denis. Respectant une tradition établie, ce sont les huit musiciens qui accompagnent Brecker et Donald Fagen qui sont venus amorcer le spectacle avec Cubano Chant, ce qui a permis de mesurer le spectre musical de ce groupe qui compte une section de cuivres.
Puis, Fagen, Brecker et leur trio de choristes, les Danettes (clin d’œil au Raelettes de Ray Charles) se sont pointés pour plonger dans le passé avec Black Cow, tiré de l’album AJa, disque-phare que Steely Dan était venu livrer en intégralité à la salle Wilfrid-Pelletier en 2009.
Pas de spectacle concept, cette fois, mais une excursion dans le catalogue du groupe qui survole plus de quatre décennies. Perfectionnistes en studio, Fagen et Brecker ne laissent rien au hasard sur scène non plus. La cohésion des 13 artistes était effarante par moments.
La fougue de Bohisattva – saluée d’une ovation – était parfaitement complémentaire aux salves blues-r&b de Black Friday, qui fait partie des chansons en rotation lors de ce tournée Jamelot Ever After (elle n’est pas jouée à tous les spectacles).
R&B/soul
Ce show-là, ma foi, semblait plus estampillé du sceau r&b/soul que les précédents. Rikki Don’t Lose That Number, Hey Nineteen, Bad Sneakers (excellente) et Dirty Work, notamment, rentraient au poste, en partie à cause de l’apport des Danettes (Caroyln Leonard, Cindy Mizelle, La Toya Hall) qui soutenaient impeccablement la voix de Fagen, encore très souple.
Steely Dan n’est jamais chiche de chansons connues lors de ses spectacles, mais le groupe se fait un devoir de sélectionner des titres moins familiers, mais pas moins appréciés des amateurs de longue date. Mercredi, Third World Man – percutante – se voulait la surprise de la soirée.
Les boys font aussi des emprunts comme I Want To (Do Everything For You), de Jo Tex, qui aura servi à présenter les musiciens et permis à Brecker de nous livrer un laïus où climat apocalyptique (« souvenez-vous où est votre parapluie!») et amour de la musique se côtoyaient.
L’instant présent a dominé quand la machine bien huilée a enchaîné Josie, Peg et une version mémorable de My Old School. Je salue la dame qui a dansé dans l’allée durant toute cette séquence… On aurait espéré que cette foule de connaisseurs soit moins passive par moments tant Steely Dan a offert une sélection de chansons remuantes.
Entre autres Reelin’ in the Years, titre entendu ad nauseam sur les ondes de CHOM FM depuis plus de 40 ans. Le guitariste Jon Herington l’a livrée à la perfection.
Il nous restait à apprécier Kid Charlemagne au rappel et à voir les musiciens – sans Fagen et Brecker, autre tradition – boucler la soirée avec le thème musical de la série télévisée Les incorruptibles. Deux heures vachement bien remplies.