Amorcée à Saint-Lazare, présentée à Québec et de passage à Paris, Genève et Bruxelles, la chevauchée internationale des Cowboys fringants atteignait finalement Montréal jeudi soir, pour le premier de deux spectacles à La Tulipe. Deux évidences sautaient au yeux : cette virée ne cesse d’évoluer et son impact est aussi jubilatoire d’un continent à l’autre.
Par Philippe Rezzonico
Tout amateur du groupe de souche qui était présent dans l’ancien Théâtre des variétés pour cette généreuse performance de deux heures et quart avait de quoi être comblé. Que ce soit en raison des nouvelles compositions de l’album Que du vent ou de la fournée de classiques des Cowboys, le menu était copieux.
Mais pour le scribe qui voyait l’actuelle tournée pour une troisième fois en autant de mois, la perspective était tout autre. Du tout premier spectacle offert à St-Lazare en décembre, tout en passant par L’Olympia en février, on ne peut que noter à quel point ce band hausse la qualité de ses offrandes, cible son répertoire en fonction de son public, tout ça, sans jamais perdre de vue l’essentiel : faire un gros party déjanté, rassembleur et universel.
Exemple : en ouverture de tournée, Télé amorçait le spectacle. Elle était interprétée au deuxième rang à Paris et en quatrième position, jeudi. En disgrâce ? Du tout. La meilleure version de cette chanson qui ridiculise le désir d’être vu à tout prix, c’est à La Tulipe qu’on l’a eue. Sauf que Paris-Montréal est plus foudroyante pour ouvrir un show. C’est tout. Et c’est la qualité d’un grand groupe de savoir s’ajuster.
Fougue contagieuse
Jeudi, donc, La Catherine et Has Been, notamment, avaient cédé leur place à Symphonie pour Caza (quelle frénésie !) et Camping Ste-Germaine. Et Ti-cul était passée de la deuxième à la première partie. Des détails, à priori, mais en réalité des ajustements qui ont fait que la première portion de ce spectacle a été probablement la plus fluide vue jusqu’ici. Et peut-être la plus fougueuse, aussi.
Tout le band sautait comme jamais en finale de Une autre journée qui se lève, magnifiée par son propos social ; Si la vie vous intéresse s’est conclue sur une séquence de violon survoltée de Marie-Annick Lépine, et Plus rien, presque folk à l’origine, est dorénavant dotée d’une longue finale rock étirée et explosive depuis que les Cowboys ont enrôlé le guitariste Daniel Lacoste.
La fête ? Que oui. Sauf que l’on avait rien vu….
La deuxième partie contenait tout ce que l’un show festif des Cowboys doit contenir. On avait eu droit précédemment au numéro de cirque de Karl Tremblay avec la basse de Jérôme Dupras (en équilibre sur son front), mais après la pause, les Cowboys ont commencé à ne pas respecter l’ordre des chansons prévues (on aime ça, les surprises), à prendre des demandes spéciales (Québécois de souche) et à lancer des gazous dans la foule ainsi qu’à servir des bouteilles de bières aux spectateurs au parterre (Le shack à Hector).
Burlesque
C’était vachement loufoque de voir Jérôme – vêtu d’une robe et de son masque digne du film Scream – frapper des gazous avec sa basse, comme s’il était Gary Carter ; d’apercevoir un rouleau de papier cul faire un vol plané en provenance du balcon, et d’admirer Jean-François Pauzé distribuer le houblon habillé en soubrette. Oui, oui, vous avez bien lu…
Ça contrastait avec la classe du veston blanc queue de pie de Karl et la jolie tenue de Marie-Annick. En passant, tous ces accoutrements loufoques comme la tenue d’homme grenouille digne de Bono de Jean-François et la combinaison jaune fluo portée par Lacoste ont été obtenus par les Cowboys lors d’une vente de feu d’une troupe de théâtre.
Les manifestes
Point forts de ce long dernier droit : La Manifestation, plus débile que d’ordinaire puisque « dédiée à tous les étudiants ! Continuez de vous battre ! » ; Tant qu’on aura de l’amour, avec le concours d’un jeune garçon nommé Nicolas qui est venu chanter sur scène ; ainsi que les brûlots que sont En Berne, Joyeux Calvaire et Awikatchikaën. Liesse et allégresse, donc.
Remarquez, il y avait bien la sympathique petite blonde – un peu éméchée – qui se plaignait durant la très jolie Les étoiles filantes qu’elle était tannée que les Cowboys finissent invariablement leurs shows avec cette chanson depuis des années. Je lui ai fait remarquer qu’il y allait avoir un deuxième rappel pas prévu. Elle ne voulait rien savoir.
J’ai eu raison. Nous avons eu droit à Classe moyenne (avec anchois), qui représente tout un défi au plan vocal, et une splendide version de Banlieue. Les Cowboys ont beau être désormais un band international, ils n’oublient jamais, jamais d’où ils viennent.
Deuxième service, vendredi. Même heure, même poste.