Pour la première fois depuis 2004, les ventes de musique aux Etats-Unis en 2011 ont été supérieures à celles de l’année précédente. Pas de beaucoup. Un seul petit point de pourcentage de hausse selon les chiffres compilés par Neilsen SoundScan. Simple année de répit avant une autre descente aux enfers ou début d’une véritable relance à moyen terme ? Voyons ça de plus près.
Par Philippe Rezzonico
Donc, 330,57 millions de disques vendus – tous formats confondus – au pays de Barack Obama, comparativement à 326,15 millions en 2010, soit 4, 420 millions d’unités de plus. Ce n’est pas ce chiffre qui retient l’attention. Ce qui frappe, c’est la hausse de 20 pour cent des albums numériques (de 86,3 millions à 103,1 millions) par rapport à la baisse de six pour cent des disques physiques.
Combien de fois avons-nous entendu ces dernières années que la hausse des ventes numériques ne compense pas la baisse des ventes albums physiques? Dans à peu près tous les textes et analyses sur le sujet. Ce n’est plus vrai. Du moins, aux Etats-Unis, en 2011.
C’est principalement le ratio de près de quatre pour un en faveur des albums numériques qui étonne. Comme on peut logiquement présumer que les gens vont acheter de plus en plus en format numérique, il est plausible de croire qu’un certain plancher a été atteint et qu’il se vendra environ quelque 300 millions de disques aux Etats-Unis dans les prochaines années, peu importe le format.
Ça ne veut pas dire qu’il n’y aura pas encore des tas de dommages collatéraux dans l’industrie, à commencer par les intermédiaires. Mais il n’est pas exclu de penser qu’il y a une certaine forme de stabilité qui s’installe chez nos voisins du Sud.
Adele première
Autre chiffre qui incite à penser qu’un tel scénario est possible, le total des ventes de l’album le plus vendu de 2011 aux Etats-Unis. Le disque 21, de la Britannique Adele, été écoulé à 5,82 millions d’exemplaires. Sa chanson Rolling In the Deep a également été la plus téléchargée (5,81 millions de fois).
Un total imposant, certes, dans le contexte d’un marché fragile, mais pas démesuré. Cinq millions était un chiffre de ventes annuel qu’on voyait souvent dans la première décennie des années 2000. On a l’impression qu’il se vendra de moins en moins souvent des albums à coup de cinq, six ou sept millions d’exemplaires, mais s’il s’en vend plus dans la fourchette des un ou deux millions, l’industrie ne sera pas perdante en définitive. Et l’écart minime qui touche les albums suivant celui d’Adele laisse croire qu’il y a une forme d’étalement.
Et ça va drôlement bien pour les chansons numériques vendues à l’unité avec un record de 1,27 milliard de téléchargements, surpassant la marque de 1,17 milliard de 2010.
Il y a quand même des trucs qui inquiètent. De savoir que deux des dix albums les plus vendus aux States en 2011 sont des albums de Noël faits par des Canadiens (Michael Bublé en deuxième position, Justin Beiber en huitième) donne le goût de se taper la tête contre les murs. Come on, guys ! Il n’y a même plus de neige dans notre pays au temps des fêtes. Je n’ose imaginer la tendance à venir.
Et puis, il faut relativiser : 330 millions de disques, c’est un chiffre impressionnant. Mais dans un pays de 312 millions d’habitants, ça ne fait toujours bien qu’une moyenne à peine supérieure à un disque par habitant par année.
A titre comparatif, le Royaume-Uni a acheté plus de 112 millions de disques en 2011 pour une population de 62 millions d’habitants. Ça, ce n’est pas loin de deux disques par personne. Faut croire qu’on pirate plus aux États-Unis…