Spectacles 2012 (3) : les 10 meilleurs spectacles…vus ailleurs

Bruce Springsteen en tournée en 2012. Photo Wikimedia Commons/Bill Ebbesen.

Il y a 20 ans cette année, je prenais la route pour un aller-retour de plus de 1300 kilomètres afin d’aller voir Bruce Springsteen dans son «hometown» du New Jersey. J’ai compris un truc ce jour-là : il y a toujours un grand spectacle qui nous tend les bras quelque part sur la planète. Il suffit de s’y rendre…

Par Philippe Rezzonico

Que ce soit à des fins professionnelles ou personnelles, la pratique s’est poursuivie durant deux décennies : Bruce, les Rolling Stones, Led Zeppelin, U2, Prince, Aznavour, Indochine, Elton John, Madonna, Genesis, Dylan, The Who et Mellencamp, que ce soit en auto, en train ou en avion, au Canada, aux États-Unis ou en Europe… Peu importe.

L’année 2012 n’a pas fait exception. Voici le bilan de 10 spectacles – ou plutôt dix escales -mémorables vécues cette année qui, on l’espère, vous inciteront vous aussi à prendre le volant, le train ou l’avion pour aller voir l’un de vos favoris quelque part. Des tas de spectacles marathons, certains vus après 36 heures sans sommeil en raison du décalage horaire. On aime.

Et le plaisir ne tient pas qu’au spectacle proprement dit, mais aussi aux voyages dans des villes fabuleuses ou pas – le New Jersey, ce n’est pas Paris, quand même… – et à la compagnie de copains fidèles et passionnés de musique. Un salut particulier à Stef, Gisèle, David, Monique, Ugo, Philippe, TL et Marie-France avec lesquels nombre de ces escales – et bien d’autres qui ne figurent pas à ce palmarès – ont été partagées en 2012.

Eh oui, Springsteen figure plus d’une fois… Normal. Il n’est pas encore passé par Montréal.

Bonne année et bons spectacles, ici ou ailleurs, en 2013.

1 – Bruce Springsteen, Palais omnisports de Paris-Bercy (Paris), 4 et 5 juillet : Sept heures de prestation en deux programmes : 3h23 pour le premier dans un aréna transformé en étuve en raison de l’absence de climatisation et 3h37 pour le deuxième, au point que l’on a raté le dernier métro.

Au-delà de la durée, c’est la présence des chansons-thématiques liées à la fête de l’indépendance américaine ou à l’Amérique (Independance Day en mode piano-voix, 4th of July, Asbury Park (Sandy), Darlington County, Born in the U.S.A., American Land) qui nous ont fait chavirer le premier soir et les raretés (For You en mode piano-voix, Something in the Night, Downbound Train, Racing in the Street, I’m Going Down) le deuxième, tout ça, avec un public complètement déchaîné. Gigantesque. Pas sûr que les Américains ont célébré leur fête nationale avec autant de plaisir que les Français cette année.

2 – Collectif (spectacle caritatif pour les sinistrés de l’ouragan Sandy), Madison Square Garden (New York), 12 décembre : Imaginez… Paul McCartney, The Rolling Stones, The Who, Rogers Waters, Eric Clapton, Bruce Springsteen, Billy Joel, Bon Jovi, Michael Stipe, Eddie Vedder, Chris Martin, Alicia Keys et Kanye West sur la même scène.

Un marathon de près de six heures qui a tenu toutes ses promesses.

Cela voulait dire entendre Helter Skelter, Live and Let Die, Jumpin’ Jack Flash, Who Are You, Baba O’Riley, Money, Comfortably Numb, Another Brick in the Wall, Crossroads, Born To Run, New York State of Mind, You May Be Right, Livin’ On a Prayer, Losing My Religion, Viva la Vida et Empire State of Mind en succession dans le MSG.

Et on a même eu les ex-Nirvana Dave Grohl et Krist Novoselic avec Macca pour un nouveau titre (Give Me Some Slack). Franchement, je n’en suis pas encore revenu, même si j’avais vu tous ces artistes plusieurs fois avant cette soirée mémorable. Événement historique.

3 – The Rolling Stones, Prudential Center (Newark), 13 décembre : La veille, ils avaient fait sauter le toit du MSG en neuf minutes. Mais là, pour un spectacle complet, les Stones septuagénaires pouvaient livrer la marchandise? Que oui.

Plus de 275 ans d'âge combiné et 200 de carrière.

Quel régal d’entendre Get Off My Cloud, The Last Time, Around and Around, Paint In Black et I Can’t Get No (Satisfaction) le meme soir, certains titres, pour une toute première fois en spectacle. Et que dire du duel à trois guitares avec Keith Richards, Ronnie Wood et le surdoué John Mayer pour Respectable… Et du sourire de Charlie Watts… Et de la condition physique olympique de Mick Jagger, à moins d’une semaine de ses 69 ans…  On pense que la tournée 50 and Counting… va se poursuivre en 2013.

4 – Indochine, Zénith (Paris), 2 février : Trente-six heures sans sommeil, 90 minutes d’attente dans un froid de canard et quatre heures debout sur le parterre étaient amplement justifiées pour ce marathon de deux heures et 20 minutes d’Indochine.

Indochine a incendie le Zénith en février. Photo Marc Tabouret.

Nicola Sirkis et ses copains célébraient le 10e anniversaire de la parution de Paradize, le disque qui a changé leur vie et fait d’eux le seul groupe rock de l’histoire à avoir présenté un spectacle au Stade de France. Dans le Zénith, ce fut le délire d’un bout à l’autre de cette prestation émouvante et fiévreuse.

5 – Bruce Springsteen, Metlife Stadium (East Rutherford), 21 et 22 septembre: En deux jours, nous aurons eu droit à la totale : un soleil éclatant, des heures d’attente dans la fosse centrale, des tas de raretés et des chansons jamais jouées lors de cette tournée (Living On the Edge of the World, From Small Things (Big Things One Day Comes), Lost in the Flood, This Little Girl Is Mine, Cynthia, In the Midnight Hour), une évacuation du stade le deuxième soir en raison de la foudre, le déluge, des tas de livraisons gigantesques de titres légendaires (Rosalita, Jungleland, Thunder Road) et même à un gâteau d’anniversaire apporté par Adele, la maman de Bruce qui est âgée de 87 ans.

Springsteen dans le stade Metlife pour ses 63 ans. Deux soirs de célébrations.

Nous étions un peu crevés, il faut admettre, après une telle virée, mais, voyez-vous, Born To Run, ce n’est pas qu’une chanson. C’est aussi un mode de vie.

6 – Les Cowboys Fringants, L’Olympia (Paris), 6 février : Ce n’était pas banal d’assister au test de son des Cowboys dans la mythique salle du boulevard des Capucines trois heures avant le spectacle. Mais c’était encore plus délirant de mesurer l’effet du groupe sur les Parisiens et les Français venus d’ailleurs quelques heures plus tard.

Les Cowboys à L'Olympia: fougue, énergie et foule survoltée. Photo Étienne Chaput.

Vous vous souvenez des foules québécoises monstres et déchaînées que l’on voyait devant les scènes québécoises du temps de la tournée Break Syndical au Québec? Les Cowboys fringants en sont là en France et partout en Europe.

7 – Collectif (Freak Out !), Palais des festivals (Montreux), 13 juillet: Non, le spectacle de cinq heures et 50 minutes du 12.12.12 ne fut pas le plus long de mon année. Bâti autour du groupe Chic piloté par Nile Rodgers, ce marathon de huit heures (20h-4h du matin) aura mené à des prestations allumées des Tavares (Turn Your Love Around, Heaven Must Be Missing An Angel), de Martha Wash (It’s Raining Men), d’Alison Moyet, de Johnny Marr (Stop Me) et de Chic, bien sûr, qui a volé le spectacle.

Chic: la meilleur piste de danse de l'année. Photo courtoisie Montreux Jazz Festival/Lionel Flusin.

Interprétation des succès du groupe (Freak Out, Dance Dance Dance, I Want your Love), donc, mais aussi des bombes que Rodgers a produit pour d’autres : I’m Coming Out et Upisde Down, de Diana Ross ; He’s the Greatest Dancer et We Are Familly, de Sister Sledge ; Like A Virgin, de Madonna, chantée comme Madonna n’est plus capable de le faire ; Let’s Dance, de Bowie et Notorious, de Duran Duran.

La meilleure piste de danse de l’année.

8 – Juliette Greco, Théâtre du Châtelet (Paris), 7 février : Elle n’a fait aucune allusion au fait qu’elle célébrait ses 85 ans sur scène, mais elle n’a pu empêcher la foule massée au Théâtre du Châtelet de lui chanter spontanément «Bon anniversaire».

Juliette Gréco en spectacle à Paris. Le triomphe de la légende. Photo Marie-Noëlle Robert-Théâtre du Châtelet.

Chaque fois, Juliette Gréco bouleverse. Ses mots sont depuis longtemps ceux de ses amis disparus (Brel, Ferré, Gainsbourg) et sa qualité d’interprétation va droit au cœur, car elle ne chante pas les chansons : elle les vit. Et dans ce magnifique théâtre d’un temps révolu, le passé et le présent étaient mêlés comme jamais.

9 – Ron Carter, Blue Note (New York), 7 avril : Ron Carter au FIJM, c’est toujours du bonbon, comme nous l’avons constaté cet été. Mais dans la légendaire salle de spectacle new-yorkaise, où il a joué avec Miles, Wayne Shorter, Herbie Hancock et Toni Williams du temps du «Quintet», ça prend une toute autre dimension.

Ron Carter, de New York au FIJM, toujours un maître. Photo courtoisie FIJM.

10 – Jesse J, Palais des festivals (Montreux), 12 juillet : Pas mal de copains m’ont demandé qui était cette Jessie J qui osait prendre la place de Freddie Mercury avec Brian May et Roger Taylor de Queen lors de la cérémonie de clôture des Jeux olympiques de Londres.

Jessis J à Montreux. Une voix et du talent à revendre. Photo courtoisie Montreux Jazz Festival/Daniel Balmat.

S’ils avaient été en Suisse pour voir la jeune dame arpenter la scène du Festival de Montreux, la question n’aurait pas eu sa raison d’être. Sur scène, la jeune Anglaise a trouvé sa voix et sa voie. Frondeuse sur les bords, elle a du panache et de la puissance vocale à revendre, sans oublier ce qu’il faut d’âme pour nous faire vibrer.

http://www.youtube.com/watch?v=YzoyDILKlhY